Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/18

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dre à ta robe en dansant, la mère te sourire en joignant les mains, le père, égaré par la joie de la délivrance, presser dans ses mains osseuses ta douce main et la baigner de larmes brûlantes. Toi aussi, Adèle, tu verseras alors des larmes de bonheur et tu ne déroberas pas tes mains à leurs mains, si rudes qu’elles soient. Vraiment, Adèle, le souvenir de pareils moments m’émeut trop !

Tandis qu’Anna esquissait ce tableau d’une voix touchante et profondément émue, son amie n’avait pas prononcé un mot, pas même une de ces paroles brèves, une de ces exclamations qui témoignent de la sympathie de celui qui écoute. L’émotion d’Anna avait passé tout entière en elle, et lorsque son amie fixa les yeux sur elle, elle la vit tirer un mouchoir de son manchon pour essuyer deux grosses larmes qui allaient s’échapper de ses yeux.

— Anna ! dit-elle, je vais visiter les pauvres avec toi. J’ai assez d’argent sur moi. Consacrons toute la matinée à de bonnes œuvres. Oh ! que je suis contente de t’avoir rencontrée.

La bonne Anna contempla son amie avec émotion ; son visage exprimait assez combien elle se trouvait heureuse d’avoir procuré une bienfaitrice de plus aux pauvres. Suivie d’Adèle elle entra, quelques pas plus loin, dans une maison où elle savait trouver des malheureux.

La maison sur le seuil de laquelle elle s’était arrêtée en voyant s’approcher son amie, était oubliée. C’était pardonnable d’ailleurs, jamais elle n’y était entrée ; et si elle se proposait de le faire, c’était uniquement pour