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LES DEUX OREILLES DU CURÉ

Au temps jadis, un riche fermier de la paroisse de Bazouges-du-Désert, ayant tué deux perdrix, invita son curé à venir les manger avec lui. Le prêtre accepta.

Au jour fixé, le paysan dit à sa femme : « J’ai invité notre recteur à diner, et voici deux perdrix que tu vas mettre à la broche. »

La fermière, aussitôt, alluma un bon feu, retroussa ses manches jusqu’aux coudes, et se mit à la besogne ; c’était une bonne cuisinière ; mais, comme gourmande, elle n’avait pas sa pareille à dix lieues à la ronde.

Lorsque les perdrix furent cuites à point, elles dégagèrent un parfum qui vint agréablement chatouiller les narines de la bonne femme. Or, bientôt elle n’y tint plus. « Faut bien que je les goûte après tout. » pensait-elle ; et, ma foi, elle détacha une cuisse de l’une des perdrix, qu’elle savoura avec délices. Une fois que son palais fut imprégné du jus de l’oiseau, ce fut fini : elle mangea l’autre cuisse puis les deux ailes, et enfin la carcasse.