Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/170

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sont chrétiens, au moins de nom, elles ont vu observer quelques pratiques extérieures de religion ; mais qu’est-ce que cela sans la conviction et la force de l’exemple ?

— Les bons principes sont rarement perdus, ma sœur.

— Certainement, mon cher frère ; mais les jeunes sont plus observateurs que nous ne le pensons, et combien n’y en a-t-il pas qui cherchent des excuses pour leur conduite dans les mauvais exemples qu’ils ont reçus de leurs parents, ou la mauvaise société qu’ils ont trouvée chez eux !

— Je crois qu’aucune famille qui se respecte ne reçoit dans son sein des personnes qui y soient déplacées, à ma connaissance du moins, ajouta sir Edward.

— Vous le croyez, Edward ; mais combien de fois il arrive que nous recevons, sans les connaître, des jeunes gens dont l’extérieur nous trompe, et qui portent le désordre et la douleur au sein de nos familles ! Avec quel soin ne devons-nous pas empêcher nos filles de se laisser séduire par leurs dehors brillants ! Je le répète, nous ne saurions être trop prudents, je dirai même trop difficiles, dans le choix de la société que nous leur permettons.

— Allons, ma sœur, dit sir Edward en riant, je vois que vous cherchez à augmenter le nombre des vieilles filles.

— Dites, mon frère, à diminuer le nombre des mauvais ménages. Je regrette souvent que l’amour-propre, la cupidité et une sorte de rivalité, entraînent les femmes à se marier sans amour, et mettent le célibat en discrédit ; quant à moi, je ne vois jamais une vieille fille sans croire qu’elle l’est par choix et par principes ; et les chagrins inséparables du mariage, dont elle est préservée, devraient seuls suffire pour apprendre aux jeunes personnes que le bonheur ne se trouve pas seulement où leur imagination le place.

— Ah ! j’entends, vous voulez que les vieilles filles servent de fanaux pour préserver celles qui les suivront du naufrage matrimonial…

— Vous plaisantez, mon frère ; vous croyez que le devoir d’un père se borne à rester paisible spectateur des orages qui peuvent s’élever dans le cœur de son enfant, et à lui donner sa bénédiction lorsqu’elle aura fait un choix bon ou mauvais ; mais tout ce que je désire, Edward, c’est que vous ne vous repentiez pas de votre système de neutralité.

— Clara a choisi le mari qu’elle a voulu, et elle s’en trouve bien,