Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/202

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assis et la tête appuyée sur sa main, paraissait abîmé dans ses réflexions. En apercevant John, il s’élança de sa chaise en s’écriant :

— Monsieur Moseley ! ne me trompé-je pas ?

— Denbigh, lui dit John en lui tendant la main, est-il bien, est-il digne de vous de nous quitter si précipitamment, et sans nous laisser du moins l’espoir de nous revoir bientôt ?

Denbigh fit signe au domestique de se retirer, et il offrit une chaise à son ami. — Monsieur Moseley, dit-il en cherchant à lui cacher son émotion et sa douleur, vous paraissez ignorer l’aveu que j’avais osé faire à votre sœur.

— Je n’en ai pas entendu parler.

— Et vous ne savez pas que j’ai essuyé un refus ?

— Est-il possible ! s’écria John en se levant et en marchant à grands pas dans la chambre ; je dois avouer que j’espérais que vous demanderiez sa main ; mais jamais je n’aurais pu penser qu’elle vous refusât.

Denbigh lui donna la lettre d’Émilie ; après l’avoir lue, John la lui rendit en soupirant : — Voilà donc la raison qui vous a forcé à nous quitter, continua-t-il ; mais Émilie n’est pas capricieuse ; ce refus ne saurait venir d’un moment de dépit ; je la connais trop pour…

— Non, monsieur Moseley, interrompit Denbigh avec tristesse ; votre sœur est à l’abri de tout reproche… ; mais je ne suis pas digne d’elle ; ma supercherie… En ce moment, le même domestique qui avait introduit John ouvrit la porte, et Peter Johnson entra. Après s’être avancé jusqu’auprès de la table qui le séparait des deux jeunes gens, l’intendant mit ses lunettes, tira de sa poche son formidable portefeuille, et y prit une lettre dont il lut l’adresse à haute voix : — A. M. George Denbigh, à Londres. Confié aux soins de Peter Johnson, intendant de Benfield-Lodge (Norfolk). Après s’être acquitté de cette partie de son devoir avec tout le cérémonial convenable, il remit la lettre à Denbigh, qui la parcourut à la hâte, et en parut vivement touché ; il pressa la main de l’intendant, le remercia avec bonté du nouvel intérêt qu’il prenait à lui, et lui dit que, s’il voulait lui donner son adresse, il lui enverrait, dans la matinée, sa réponse à M. Benfield.

Peter s’empressa de le satisfaire ; mais il paraissait craindre de se retirer avant de s’être assuré que cette réponse serait telle qu’il