Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/303

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quiétude serait devenue trop pénible, si Mrs Wilson ne se fût empressée de lui témoigner une confiance dont son amitié pour Émilie la rendait si digne ; elle lui raconta en peu de mots le changement de nom du jeune comte, dont elle ignorait encore le motif, et les quiproquo fâcheux qui en étaient résultés.

— N’est-il pas désagréable, dit lady Chatterton gaiement, tandis qu’une larme brillait dans ses yeux, que des plans aussi bien combinés que ceux que nous avions formés avec Derwent deviennent tout à coup inutiles et soient perdus pour la postérité ! Émilie en aurait trompé de plus fins avec son petit air posé ; mais mon rigide cousin !….. oh ! comme je vais le gronder de sa supercherie !

— Je crois qu’il se repent déjà sincèrement de l’avoir employée, dit Mrs Wilson en souriant, et son erreur est assez punie par les suites qu’elle a eues pour son repos : quatre mois de souffrances sont un châtiment bien sévère pour un amant.

— Oui, répondit Henriette avec un sourire malin, s’il avait souffert seul ; mais une autre a partagé la peine qu’elle n’avait point méritée, et il peut compter que je ne l’épargnerai pas.

L’intérêt qu’Henriette prenait à son amie était encore augmenté par la découverte inattendue de l’amour mutuel qui l’unissait à Pendennyss ; et, quoique ce dernier fût absent, les heures qui s’écoulèrent jusqu’à celle de son retour ne parurent aux trois amies qu’un rapide enchantement. Lady Chatterton déclarait que, malgré son amitié pour son frère, elle préférait qu’Émilie devînt la femme de Pendennyss, qui seul était digne d’elle. Mrs Wilson se sentait mille fois plus heureuse qu’elle n’avait jamais espéré l’être en voyant se réaliser des souhaits que son âge, sa philosophie, et même la religion, n’avaient pu l’empêcher de former. Les yeux d’Émilie brillaient d’un nouvel éclat, et son cœur battait d’espérance et de bonheur.

À l’heure indiquée, le bruit d’une voiture annonça l’arrivée du comte et de sa sœur.

Pendennyss entra dans le salon en donnant le bras à une jeune personne très-délicate, mais douée d’une grande beauté ; il la présenta à Mrs Wilson, comme lady Marianne Denbigh, sa sœur ; et la douceur et l’affabilité de Marianne firent bientôt oublier à ses nouvelles connaissances qu’elles la voyaient pour la première fois. Quoique Émilie eût une confiance entière dans l’honneur et la