Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/332

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un peu vivement, la querelle s’échauffa, et ils se séparèrent également mécontents l’un de l’autre. Les adieux de George avec sa mère furent plus tendres ; et comme lady Margaret avait toujours pensé qu’Isabelle n’était pas un parti qui convint au descendant de plusieurs ducs, elle lui pardonna presque son offense en faveur du motif.

— Qu’est-ce que je vois là ! s’écria sir Peter Howell en parcourant les journaux pendant son déjeuner ; le capitaine des gardes Denbigh vient d’être nommé lieutenant-colonel d’un régiment d’infanterie, et il part demain pour aller rejoindre son régiment qui va s’embarquer pour l’Amérique ! — C’est un mensonge, Isabelle ! c’est un infâme mensonge ! Ce n’est pas que je le blâmerais d’aller servir son roi et son pays ; mais il ne voudrait pas vous jouer un pareil tour, Isabelle.

— Comment ? dit Isabelle qui avait peine à contenir son émotion en voyant que George avait si noblement tenu sa parole, et qu’elle n’avait plus rien à craindre : qu’ai-je de commun avec le départ de M. Denbigh ?

— Parbleu ! s’écria son père étonné, ne devez-vous pas être sa femme ? Tout n’est-il pas convenu entre vous… c’est-à-dire entre sir Frédéric et moi, ce qui revient au même, comme vous savez ?

Il fut interrompu dans ce moment par l’arrivée soudaine du général, qui venait dans le double motif d’instruire le premier son ami de la fatale nouvelle, et de chercher à faire sa paix avec lui. Isabelle se retira dès qu’elle le vit entrer.

— Tenez, Denbigh, lisez ! s’écria l’amiral qui, lui montrant du doigt le paragraphe, entra brusquement en matière : — Que dites-vous de cela ?

— Ce n’est que trop vrai, que trop vrai, mon cher ami, répondit le général en baissant tristement la tête.

— Écoutez, sir Frédéric Denbigh, dit l’amiral avec fierté, ne m’avez-vous pas promis que George épouserait ma fille ?

— Oui, sans doute, Peter, reprit son ami avec douceur ; et j’ai le regret de vous annoncer que, malgré mes prières et mes menaces, il a déserté la maison, et que je suis décidé à ne le revoir jamais.

— Eh bien ! Denbigh, s’écria l’amiral, que cette déclaration adoucit un peu, n’avais-je pas raison de vous dire que vous autres