Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/373

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— Faites-moi le plaisir de me faire part de ces bonnes nouvelles, Monsieur, dit la comtesse.

— Il est arrivé sain et sauf près de Bruxelles avec son régiment ; je l’ai appris d’un fils de mes voisins qui l’a vu entrer dans la maison qu’occupe dans cette ville le duc de Wellington, tandis qu’il s’était glissé dans la foule pour tâcher d’apercevoir le noble duc.

— Émilie sait cela depuis dix jours, dit Mrs Wilson en riant ; mais votre ami ne vous dit-il rien de Buonaparte ? nous nous intéressons beaucoup à ses mouvements.

M. Haughton, un peu mortifié de voir qu’il n’avait débité qu’une vieille nouvelle, ne savait trop s’il devait continuer ; mais il aimait par-dessus tout à jouer le rôle d’une gazette, et il reprit :

— Je n’en sais rien de plus que ce qu’en disent les papiers ; mais je suppose que vous n’ignorez pas ce qui est arrivé au capitaine Jarvis ?

— Pardonnez-moi, dit Émilie en souriant ; les faits et gestes du capitaine ne sont pas tout à fait aussi intéressants pour moi que ceux de lord Pendennys. Le duc de Wellington l’a-t-il nommé son aide-de-camp ?

— Non, non, répondit l’autre enchanté d’avoir au moins une nouvelle à leur apprendre ; aussitôt qu’il entendit parler du retour de Buonaparte, il trouva prudent de donner sa démission et de se marier.

— De se marier ! s’écria John ; ce n’est sûrement pas avec miss Harris ?

— Non, non, il a épousé une sotte fille qu’il a trouvée dans le comté de Cornouailles, et qui a été assez folle pour s’amouracher de ses épaulettes. Le lendemain de son mariage, il a annoncé à sa femme inconsolable et à sa mère, qu’un tel discours a atterrées, que l’honneur des Jarvis pouvait dormir jusqu’à ce que ses descendants fussent assez nombreux pour ne pas craindre de voir s’éteindre une si noble race, en exposant leur vie sur un champ de bataille.

— Et comment Mrs Jarvis et lady Timo reçurent-elles cette nouvelle foudroyante ? demanda John, espérant entendre le récit de quelque scène ridicule.

— La première se mit à pleurer, dit M. Haughton ; elle se plaignit d’avoir été trompée, puisqu’elle ne l’avait épousé que pour