Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/244

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douzaine de matelots s’occupèrent à mettre en sûreté les voiles hautes et légères.

Mais quoique la hardiesse avec laquelle l’Écumeur de mer porta des voiles jusqu’au dernier moment fût justifiée par le résultat, cependant les effets du vent qui augmentait, et le gonflement des voiles, devinrent plus sensibles. Tandis que le brigantin petit et bas naviguait péniblement, la Coquette fendait l’onde avec légèreté, et par conséquent avec moins de résistance de la part des vagues. Vingt minutes, pendant lesquelles la force du vent fut presque toujours la même, amenèrent le croiseur assez près de l’objet de sa poursuite pour lui permettre de distinguer la plupart des petits objets qui étaient visibles au-dessus de ses cordages élevés.

— Soufflez, vents, et enflez vos joues ! dit Ludlow, excité par cette apparence de succès, je ne vous demande qu’une demi-heure, puis changez suivant votre caprice !

— Soufflez, bon diable, et vous aurez le cuisinier ! murmure Trysail, en citant un auteur bien différent. Une autre bouffée nous permettra de le héler.

— La rafale nous quitte ! interrompit le capitaine, qu’on couvre le vaisseau de voiles, monsieur Luff, depuis le haut jusqu’en bas ! Le sifflet du maître d’équipage fut entendu de nouveau aux écoutilles, et l’ordre : Tout le monde aux voiles ! appela les matelots à leur poste. Les voiles furent déployées avec une rapidité qui égalait presque celle avec laquelle elles avaient été descendues, et la violence de la brise avait à peine quitté le vaisseau, avant que des volumes compliqués de toiles fussent étendus pour saisir ce qui en restait. D’un autre côté le brigantin, plus hardi encore que le croiseur, n’attendit pas la fin du coup de vent, mais, profitant de l’avertissement qui lui était donné par le croiseur, il commença à hisser ses vergues tandis que la mer était encore blanche d’écume.

— Le coquin a la vue bonne et s’aperçoit que nous sommes débarrassés du coup de vent, dit Trysail, et il attend son tour. Nous gagnons peu sur lui malgré le nombre de nos bras.

Le fait était trop vrai pour être contesté, car le brigantin voguait à pleines voiles avant que le vaisseau eût profité d’une manière sensible de la supériorité de ses forces physiques. Ce fut en ce moment, lorsque la Coquette eût pu posséder quelque avan-