Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/380

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pour repartir de nouveau, sans cela j’aurais pu être évêque : quel homme au monde pourrait me dire le contraire ? C’est une triste nuit, capitaine Ludlow, et qui n’est pas trop prodigue d’étoiles. Je n’ai jamais vu d’expédition heureuse lorsqu’une lumière naturelle ne l’éclairait pas.

— Cela n’en vaut que moins pour ceux qui cherchent à nous attaquer. J’ai bien certainement entendu le bruit d’un aviron sur le bord d’un canot.

— Cela venait de la terre et avait un son qui annonçait la côte, reprit vivement le maître, qui tenait toujours ses yeux tournés vers le ciel. Ce monde dans lequel nous vivons, capitaine Ludlow, est bien extraordinaire ; mais celui dans lequel nous devons aller est plus étonnant encore. On assure que des mondes naviguent au-dessus de nos têtes comme un vaisseau sur une mer tranquille ; et il y a des gens qui croient que lorsque nous prenons congé de cette planète, nous nous embarquons simplement pour une autre, dans laquelle nous sommes rangés suivant le mérite de nos actions dans celle-ci ; ce qui est à peu près la même chose que d’être embarqué sur un nouveau vaisseau avec un certificat de service dans sa poche.

— La ressemblance est parfaite, dit Ludlow s’appuyant sur un apotureau, ou tête de certaines allonges servant à l’amarrage des manœuvres, afin d’entendre le plus petit son qui venait de l’Océan.

C’était simplement la respiration d’un marsouin. Elle était assez forte pour qu’on supposât que c’était celle d’une baleine. Les gros poissons ne sont pas rares sur les côtes de cette île, et les meilleurs harponneurs sont répandus çà et là dans ces sables jusque plus au nord.

— J’ai fait voile une fois avec un officier qui connaissait le nom de toutes les étoiles, et bien souvent j’ai passé des heures entières, pendant le quart de minuit, à écouter l’histoire de leur magnificence et de leur caractère. Son opinion était qu’il n’y avait qu’un navigateur pour tous les corsaires de l’air, météores, comètes ou planètes.

— Il n’y a pas de doute qu’il n’ait raison, y ayant été.

— Non, c’est plus que je n’ose assurer, quoique peu d’hommes aient été plus loin dans les hautes latitudes, des deux côtés de l’équateur. Je viens certainement d’entendre parler ; il y a une ligne sous cette étoile qui est là-bas.