Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prédicateur ne trompèrent point les espérances excitées par son extérieur. Il peignit dans un fort et sinistre langage les dangers que courait le pécheur, rétrécit le chemin du salut dans des limites métaphysiques, et fit de fréquents appels à la crainte et aux passions les moins nobles de ses auditeurs. Tandis que le plus grand nombre se tenaient debout, écoutant avec indifférence ou regardant les tombeaux ou les autres ornements de l’église, un groupe de fidèles se pressait autour de la colonne qui soutenait la chaire du prédicateur, éprouvant une profonde sympathie pour les tableaux qu’il traçait des peines et de la désolation qui attendaient le pécheur.

Le sermon amer et terrible du frère Johan fut bientôt terminé ; et comme il rentrait dans le chœur, l’abbé se leva et se dirigea vers les cloîtres suivi d’une partie de la confrérie. Mais ni le comte d’Hartenbourg, ni aucune personne de sa suite, ne semblaient disposés à quitter si promptement l’église. Un air d’attente semblait retenir la plupart de ceux qui étaient dans le temple. Un moine vers lequel tous les yeux étaient tournés céda à cet appel général et silencieux ; et, quittant sa stalle, qui était un des siéges d’honneur, il vint occuper la place que le père Johan venait de laisser vacante.

Au même moment le nom du père Arnolph, le prieur, ou le gouverneur spirituel de la communauté, se répandit parmi le peuple. Emich se leva, et, accompagné de ses amis, il prit un siège près de la chaire, tandis que la masse des visages écoutant avec attention, proclamaient l’intérêt de sa congrégation. La contenance et les manières du père Arnolph justifiaient cet intérêt si simplement exprimé. Son œil était doux et bienveillant, son front large et paisible ; et l’expression dominante de son visage était celle d’une profonde philanthropie ; on voyait encore sur ses traits des marques évidentes de mortification, de méditation profonde et d’une douce espérance.

Les opinions spirituelles d’un tel homme n’étaient point en opposition avec son extérieur. Sa doctrine, comme celle du divin Maître qu’il servait, était charitable et remplie d’amour. Bien qu’il parlât des terreurs du jugement, c’était avec douleur plutôt qu’avec menace ; et c’était lorsqu’il prêchait la charité ou la foi qu’il trouvait une éloquence plus persuasive. Emich sentit de nouveau ses intentions secrètes ébranlées, et son front reprit une