Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/31

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— Je les ai conduits sur la montagne pour leur faire prendre l’air et leur donner de l’exercice. Ils ont poursuivi pendant quelques instants un chevreuil ; mais comme tout le gibier ici appartient à notre maître, je n’ai pas jugé convenable de les faire aller plus vite qu’il ne faut.

— Je suis bien aise de d’entendre parler ainsi, car je compte sur ta compagnie en grimpant la montagne, lorsque notre ouvrage sera fini. Tes jambes n’en vaudront que mieux après ce travail.

— Tu as ma parole, et je ne manquerai pas au rendez-vous. Pour ne point perdre de temps, nous allons nous séparer ici afin de nous rencontrer de nouveau dans le hameau.

Le forestier et le pâtre se dirent adieu et se séparèrent. Le premier quitta le sentier, tournant subitement à droite par un petit chemin particulier qui le conduisit à travers des prairies étroites où brillait la petite rivière dont nous avons déjà parlé, au pied, de la montagne opposée. Gottlob se dirigea vers le hameau qu’on pouvait alors apercevoir, et qui couvrait entièrement, un espace de peu de largeur dans la vallée, à un point où cette dernière faisait un coude presque à angle droit avec sa direction générale. Le vacher se rendit à une habitation bien différente de la grossière étable où se dirigeaient ses vaches. Un château massif occupait un des points les plus élevés de la montagne, suspendu sur l’amas de maisons dans le ravin, et menaçant tous ceux qui tentaient de franchir le défilé. Ce bâtiment était vaste et irrégulier. Les parties les plus modernes étaient des tours saillantes circulaires, bâties sur le bord du rocher, des créneaux desquels il n’eût pas été difficile de jeter une pierre sur la route ; dans leur construction on avait calculé tout ce qui pouvait ajouter à leur force, tandis que la beauté des formes et du travail, suivant le goût de l’époque à laquelle nous écrivons, n’avait pas été entièrement négligée. Ces tours n’étaient que des accessoires au principal bâtiment, qui, vu de la position où nous avons placé le lecteur, n’offrait qu’une masse confuse de murailles, de cheminées, de toits. Dans quelques endroits, les premiers s’élevaient d’une pelouse de verdure qui couvrait le penchant de la montagne ; tandis que dans d’autres on avait profité du roc ; et il était si fréquemment mêlé au bâtiment qu’il supportait, l’un et l’autre étant de la même pierre rougeâtre, qu’il n’était pas facile à la première vue de distinguer l’ouvrage de la nature de celui de l’art.