Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/73

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relativement à l’écrivain, compose ce qu’on appelle le monde. Qu’on ne dise pas de nous, parce que nous faisons souvent allusion aux opinions et aux usages tels qu’ils existent dans notre pays, que nous ignorons complètement ceux des autres contrées ; nous faisons ces allusions, qui paraissent un crime aux lecteurs hostiles, parce qu’elles répondent mieux à notre but en écrivant, parce qu’elles ont rapport à un état de société plus familier à notre esprit, et parce que d’autres ont parlé de l’Amérique de manière à perpétuer l’ignorance et les préjugés. Si, sans le vouloir, nous trahissions la vanité nationale, cette tache du caractère américain, nous sollicitons d’avance notre pardon, présentant pour notre justification l’aptitude d’un jeune pays à tomber insensiblement dans la manie de l’imitation, et priant l’observateur critique de ne point faire attention aux fautes qui pourraient nous échapper, si nous ne faisions pas preuve de ce talent d’exécution qui est le fruit d’une grande pratique. Jusqu’ici nous croyons qu’on ne peut pas justement accuser notre modestie. Ayant abandonné les vertus à tout le genre humain, n’ayant, à notre connaissance, jamais parlé du courage américain, de l’honnêteté américaine, de la beauté américaine, pas plus que de la fermeté d’âme des Américains, et même de la force de leurs bras, comme si ces qualités n’appartenaient qu’à eux et non pas à toutes les nations ; mais nous étant contenté, dans le langage sans sophisme de nos climats de l’ouest, d’appeler la vertu vertu, et le vice vice. En cela, nous savons que nous sommes resté en arrière d’innombrables écrivains classiques de notre époque, quoique nous pensions que nous ne perdons pas beaucoup par cette réserve, ayant des preuves suffisantes que lorsque nous désirons rendre nos pages désagréables aux étrangers, nous pouvons effectuer ce projet par des allusions beaucoup moins importantes au mérite national. Nous avons de bonnes raisons de croire qu’il existe une certaine classe querelleuse de lecteurs qui regardent les louanges les plus délicates et les plus réservées sur le Nouveau-Monde, comme étant injustement dérobées à l’ancien. Sous ce rapport, dans notre belle patrie, celui qui vise au succès en flattant l’étranger, et celui qui espère briller dans sa petite sphère par une lumière empruntée, nous les abandonnons au reproche qui ne pourra manquer de les atteindre, reproche rendu plus amer par la conscience de l’avoir mérité, grâce à une servilité aussi dégradante qu’elle est contre