Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 13, 1839.djvu/326

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être avec raison blessés de sa conduite et de son manque de foi, ne pensent pas qu’il méritait un aussi cruel châtiment !

— Vous parlez comme un jeune homme sensible, comme un chrétien, herr Sigismond, répondit le bailli, et j’approuve vos paroles. Refuser de se marier avec une jeune fille et être assassiné sont deux choses fort différentes et ne peuvent être confondues. Croyez-vous que ces Augustins aient du kirschwasser dans leur cave ? C’est un travail pénible que de grimper jusqu’à leur couvent, et il faut boire quand on est fatigué ; enfin, s’ils n’en ont pas, nous nous contenterons de leurs autres liqueurs. Herr Sigismond, faites-moi le plaisir de me donner le bras.

Le bailli descendit de sa mule, ses jambes étaient engourdies, et il marcha doucement vers le couvent en s’appuyant sur le bras de Sigismond.

— Il est condamnable, de garder rancune, et doublement de garder rancune contre les morts ! Ainsi, je vous prie de prendre note que j’ai tout à fait oublié la conduite récente du défunt relativement à nos jeux publics, comme il convient à un juge impartial de le faire : pauvre Jacques Colis ! La mort est affreuse dans tous les temps, mais il est dix fois plus horrible de mourir d’un train de poste semblable, et encore sur une route où l’on ne peut mettre un pied devant l’autre sans ressentir la plus grande fatigue ; voici la neuvième visite que je fais aux moines Augustins, et quoique je leur souhaite beaucoup de bien, je ne puis pas leur faire compliment de leur route. Le révérend frère quêteur est-il de retour ?

— Oui, et il a montré beaucoup d’activité dans cette affaire.

— L’activité est sa plus grande fortune, et celui qui mène la vie d’un montagnard en a besoin, herr Steinbach. Le noble Génois et mon vieil ami Melchior, ainsi que sa fille, la charmante Adelheid, et l’équitable châtelain, sont donc en bonne santé comme vous venez de me le dire ?

— Ils peuvent remercier Dieu d’avoir échappé à la dernière tempête.

— C’est bien, mais c’est dommage que ces saints moines n’aient point de kirschwasser.

Peterchen entra dans le couvent, où l’on n’attendait plus que sa présence pour terminer l’affaire. Les mules furent mises à l’abri, les guides reçus, comme à l’ordinaire dans l’intérieur du bâtiment, et l’on se prépara à l’interrogatoire.

Nous avons déjà dit que le couvent de Saint-Bernard avait une