Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/152

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— Si la vapeur s’échappait constamment, le mouvement diurne lui donnant à chaque instant une nouvelle position, la terre ne serait pas poussée en avant dans son orbite : c’est un fait certain, capitaine Poke ; mais comme cet échappement de la vapeur a un caractère de pulsation, en ce qu’il est périodique et régulier, la nature a voulu qu’il n’eût lieu qu’une fois dans les vingt-quatre heures, de manière à rendre son action uniforme, et à donner à son impulsion toujours la même direction. Le principe d’après lequel la terre reçoit cette impulsion peut être démontré par une expérience très-facile. Prenez, par exemple, un fusil à deux coups, chargez-le d’une quantité de poudre plus qu’ordinaire, mettez dans chaque canon une balle et double bourre, placez la culasse à quatre pouces 628/1000 de l’abdomen, et ayez soin de tirer les deux coups en même temps. Dans ce cas, les balles donneront un exemple des quarante mille milles carrés de territoire, et la personne qui fera l’expérience ne manquera pas d’imiter l’impulsion ou le mouvement rétrograde de la terre.

— Mais en admettant tout cela, ami Reasono, je ne vois pas pourquoi la terre ne finirait pas par s’arrêter, comme l’homme ne manquerait pas de le faire quand il aurait eu assez juré et gambadé.

— La raison pour laquelle la terre, une fois mise en mouvement dans le vide, ne s’arrête pas, peut aussi être démontrée par l’expérience suivante : Prenez le capitaine Noé, pourvu de jambes et doué de mouvement, comme il l’est, par la nature ; conduisez-le à la place Vendôme, faites-lui payer trois sous, ce qui lui procurera l’entrée de la colonne ; qu’il monte au sommet, puis, qu’il s’élance de toutes ses forces au milieu de l’air, dans une direction à angle droit avec le fût de la colonne, et on verra que, bien que l’impulsion primitive n’eût pu porter le corps en avant que de dix à douze pieds tout au plus, le mouvement continuera jusqu’à ce qu’il ait touché la terre. — Corollaire : d’où résulte la preuve que tous les corps dans lesquels le vis inertiœ a été vaincu, continueront à se mouvoir jusqu’à ce qu’ils viennent en contact avec quelque pouvoir capable de les arrêter.

— Nom d’un roi ! — Ne pensez-vous pas, monsieur Reasono, que si la terre fait un circuit, c’est parce que votre vapeur, se portant toujours un peu d’un côté, sert, comme qui dirait, de gouvernail ? ce qui la tient en respect, voyez-vous ; et comme une frégate tient plus de place qu’une chaloupe, il faut qu’elle