Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/209

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conquérant, perturbateur du repos de ses semblables : circonstance qui fixait l’attention publique sur cet endroit. Peu d’hommes y allaient sans avoir leurs pensées absorbées par les exploits passés et la fortune actuelle de l’individu en question. Quant à lui, il ne trouvait rien qui pût l’intéresser bien vivement dans des événements qui n’avaient rapport qu’à la grandeur humaine, l’histoire des petites querelles des hommes et des convulsions de leurs États incivilisés n’offrant rien qui pût attirer l’attention d’un philosophe monikin. Mais, comme tous les yeux étaient fixés dans une seule direction, il en était résulté qu’il avait eu une liberté d’action dont il s’était empressé de profiter ; et il se flattait humblement qu’on reconnaîtrait qu’il l’avait fait d’une manière qui n’était pas indigne d’approbation. Tandis qu’il cherchait des minéraux sur les rochers, son attention s’était fixée sur certains êtres appelés singes dans la langue du pays, mais que, d’après des affinités très-évidentes d’une nature physique, il y avait de bonnes raisons pour regarder comme pouvant avoir eu une origine commune avec les Monikins. L’académie verrait sur-le-champ combien il était à désirer d’obtenir tous les détails possibles sur les habitudes, la langue, les coutumes, les mariages, les obsèques, les opinions religieuses, les traditions, l’état des sciences, et la condition morale de ce peuple, dans la vue de s’assurer si ces affinités n’étaient qu’un de ces caprices auxquels on sait que la nature est sujette, ou si, comme quelques-uns de leurs meilleurs écrivains le soutenaient avec assez de vraisemblance, ils étaient les descendants d’une partie de ceux qu’ils avaient coutume de désigner sous le nom de « Monikins perdus. » Il avait réussi à obtenir son admission dans une famille de ces êtres ; il y avait passé un jour entier. Le résultat de ses recherches avait été qu’ils faisaient véritablement partie de la famille des Monikins ; qu’ils conservaient encore assez de génie et d’esprit pour démontrer leur origine ; mais que cependant leurs facultés intellectuelles étaient cruellement émoussées, et que peut-être même leurs moyens de perfectionnement avaient été anéantis par le choc de l’éruption qui les avait dispersés sur la surface de la terre sans leur laisser ni pays, ni demeure, ni espérance. Les vicissitudes du climat, une grande différence survenue dans leurs habitudes, avaient certainement produit en eux quelques changements physiques ; mais ils offraient encore des traits assez