Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/280

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en lui une apparence de caricature. Voyant que tout allait à son gré, le juge rédigea et signa la nomination du chargé d’affaires, et se mit ensuite à lui donner les instructions d’usage.

« En toute occasion, lui dit-il, vous devez prendre le plus grand soin de ne jamais offenser la cour de Leaphigh, ni même le dernier des courtisans qui s’y trouvent, en avançant vos opinions particulières. Vous devez être si réservé à cet égard, que vous pouvez même, en ce qui vous concerne, et pro tempore, abandonner le républicanisme, oui, même le saint républicanisme, sachant qu’il vous sera facile d’en reprendre les principes à votre retour à Leaplow. N’oubliez pas qu’il n’y a rien de si vulgaire et de si peu diplomatique que d’avoir une opinion sur quelque sujet que ce soit, à moins que ce ne soit celle des personnes avec qui vous vous trouvez pour le moment ; et comme nous avons, partout ailleurs qu’à Leaplow, la réputation de posséder cette qualité à un degré éminent, prenez un soin tout particulier de ne jamais avoir un ton commun, si cela vous est possible. Vous vous rappellerez aussi de ne jamais porter une longue queue dans vos relations privées, mais d’en avoir une aussi longue que possible quand vous aurez à paraître en public ; car c’est un des points les plus importants de la balance de notre gouvernement. Toutes nos institutions étant établies par la masse du peuple pour l’utilité particulière de tous, vous veillerez avec la plus grande attention à ce que les prétentions d’aucun citoyen, ni même d’aucune classe de citoyens, ne puissent nuire à cette harmonie qu’il est si nécessaire pour l’intérêt du commerce de maintenir avec les cours étrangères ; car ces cours, étant accoutumées à regarder leurs sujets comme des bêtes de somme faites pour être attelées au char du gouvernement, deviennent singulièrement rétives quand elles voient quelque individu se donner des airs d’importance. Si quelque habitant de Leaplow devenait importun à ce sujet, faites-lui tout d’un coup une mauvaise réputation parmi nos concitoyens, en jurant que c’est un désorganisateur ; et, je vous le garantis sur ma vie, les deux opinions vous soutiendront ; car il n’y a rien sur quoi elles soient si bien d’accord que sur la déférence absolue qu’on doit l’opinion publique des pays étrangers, surtout en ce qui peut diminuer nos profits en dérangeant nos opérations commerciales. Vous devez être en relation constante avec quelques-uns des meilleurs faiseurs d’articles de journaux, et veiller à ce que les