Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/306

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’élection périodique du plus sage et du meilleur des habitants de Leaplow.

On ne peut nier que l’intérêt ne dût s’accroître par la singulière circonstance de se trouver, en abordant sur une terre étrangère, loué, injurié sur les murs de la capitale, et membre du parlement, le tout dans le même jour. J’eus soin cependant de dominer assez les sensations de l’orgueil satisfait et de l’amour-propre blessé, pour conserver la faculté de considérer ce qui m’entourait, et de recueillir, avec toute la justesse et la rapidité dont j’étais susceptible, un aperçu des mœurs, des penchants et des habitudes, des désirs et des besoins de mes commettants.

J’ai déjà exprimé l’intention d’insister d’une manière spéciale sur les perfections morales qui distinguent les peuples du monde monikin. Je ne pus cependant pas traverser les rues de Bivouac sans remarquer un petit nombre d’usages matériels que je mentionnerai, parce qu’ils se rattachent évidemment à l’état social et aux souvenirs historiques de cette intéressante portion de la région polaire.

J’observai d’abord que toutes les espèces de quadrupèdes sont aussi maîtres dans les promenades de la ville que les habitants eux-mêmes ; fait qui, je n’en doute pas, se lie au principe d’égalité de droits sur lequel reposent les institutions nationales. En second lieu, il me fut impossible de ne pas voir que leurs maisons, construites sur une base infiniment petite, s’appuyant l’une sur l’autre, offrent ainsi l’emblème du soutien mutuel obtenu par le système républicain, et prennent en hauteur le développement qui leur manque en largeur ; coutume singulière que je n’hésitai pas un instant à attribuer à l’usage d’habiter les arbres, à une époque peu éloignée. Enfin, j’observai qu’au lieu de placer l’entrée de leurs demeures près du sol, comme font les hommes et même presque tous les animaux non ailés, ils montent par des marches extérieures à une ouverture placée à distance égale du toit et de la terre. Une fois là, ils montent et descendent dans le bâtiment, suivant que l’occasion l’exige. Je ne mets pas en doute que cet usage ne vienne du temps, récent encore, où l’état sauvage du pays obligeait à se protéger contre les ravages des bêtes féroces, en ayant recours à des échelles qu’on tirait après soi lorsque toute la famille était remontée au sommet de l’arbre après le coucher du soleil. On emploie en général pour ces escaliers quelque