Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/355

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en parlant de s’engager sous les bannières d’un Divin. Le lecteur a déjà entendu parler de chefs politiques connus à Leaplow sous le nom des plus patriotiques patriotes. Ces chefs, il est à peine utile de le dire, sont toujours avec la majorité, ou dans une situation à n’avoir rien à craindre des évolutions de la petite roue. Leur grand principe de rotation les tient constamment en mouvement, il est vrai ; mais tandis qu’il existe une force centrifuge pour maintenir cette action, on a pris de grands soins pour conserver un contre poids centripète, afin de les empêcher d’être lancés hors de l’orbite politique. C’est probablement par cette organisation particulière de leur parti que les patriotes de Leaplow sont si remarquables pour tourner constamment autour d’un sujet sans jamais le toucher.

Cet arrangement de parti convenant aux opinions des Perpendiculaires, ils s’étaient réfugiés dans les Divins. Un Divin, parmi les politiques de Leaplow, ressemble sous quelques rapports à un saint dans le calendrier catholique : c’est-il-dire qu’il est canonisé après avoir traversé avec succès un certain cercle de tentations et de vices, lorsque sa cause a été plaidée pendant un certain nombre d’années devant les autorités de son parti, ou enfin après avoir fait la moitié de son purgatoire en cette vie. Néanmoins lorsque la canonisation est obtenue, il n’y a plus de danger de faire voile avec lui ; et il lui est épargné, quelque singulier que cela paraisse, cette fatigue de cerveau dont parlait Noé ; car rien ne soulage sous ce rapport comme le plein pouvoir de penser pour tout le monde. Penser en société, comme voyager en société, exige que nous ayons quelque considération pour les mouvements, les souhaits et les opinions des autres ; mais celui qui a carte blanche dans ses sentiments, ressemble à l’oiseau sorti de cage, il peut voler dans les directions qui lui plaisent le plus, avec toute confiance d’être salué du signal ordinaire du voyageur, « tout est prêt. » Je ne puis mieux comparer l’opération de ces Divins et de leurs sectaires qu’à l’action d’un locomoteur et sa suite sur un chemin de fer. Comme le premier marche les autres suivent, vite ou doucement. Le mouvement est sûr d’être accompagné d’un autre. Lorsque la vapeur est en jeu, tous prennent leur course avec rapidité. Lorsque le feu s’éteint, ils sa traînent ; si quelque chose de la machine se brise, ceux qui avaient voyagé jusque alors sans le plus petit embarras, sont obligés de descendre et de pousser à