Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/120

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s’avancer plus au sud, ce qui l’aurait conduit trop loin, et enfin il prit la détermination de gouverner vers les Açores, qui étaient aussi près de sa route qu’il était possible, et de jeter l’ancre dans un port neutre, s’il se trouvait serré de trop près.

Il eut une conférence à ce sujet avec son premier lieutenant, et il la termina en disant : — Il ne peut nous rejoindre avant la nuit, Leach. L’ouragan sera alors à son plus fort, si nous devons avoir un ouragan, et alors il ne se souciera pas de mettre ses embarcations en mer. Pendant ce temps, nous approcherons des Açores, et il n’y aura rien de bien extraordinaire si je trouve l’occasion de lui jouer un tour. Quant à offrir le Montauk en sacrifice sur l’autel du tabac, c’est une catégorie qu’il faut éviter au prix de toute catastrophe, pourvu qu’elle ne conduise pas à la confiscation du bâtiment.


CHAPITRE XI.


Moi qui fais tomber une légère rosée sur les feuilles endormies, j’amène aussi les tempêtes — les tempêtes de la mémoire, de la pensée, des remords. Respecte moi, ô terre ! je suis la nuit solennelle.
Mistress Hemans



Notre tâche, en ce moment, n’est pas de peindre les phénomènes de l’Océan, mais de tracer le tableau d’un ouragan régulier quoique furieux. Un des premiers symptômes de sa violence fut la disparition des passagers, qui quittèrent le pont les uns après les autres pour regagner chacun leur chambre. Il n’y resta que John Effingham et Paul Blunt. Ils avaient fait tous deux, à ce qu’il paraissait, tant de voyages sur mer, qu’ils s’étaient familiarisés avec la navigation, et que ni le mal de mer, ni les alarmes d’aucune espèce, ne pouvaient avoir de prise sur eux.

Les pauvres passagers de l’avant ne firent pas exception. Horriblement tourmentés par le mal de mer, ils se réfugièrent dans leurs antres, se repentant de bon cœur, pour le moment, d’avoir bravé les dangers de l’Océan. La femme de Davis aurait voulu alors être exposée à tout le ressentiment de son oncle ; et, quant à son mari, M. Leach, qui traversa cette scène d’abomination pour voir si tout était dans l’ordre, dit au capitaine que M. Grab ne le toucherait pas plus qu’un torchon sale, s’il le voyait dans l’état où il était.

Le capitaine Truck rit beaucoup de cette remarque, car il avait pour les cas ordinaires du mal de mer autant de compassion qu’un