Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/183

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surtout aux revues et le jour du sabbat. Le manque de science y était remarquable, et si c’est là de la musique, en ce cas, je n’y connais rien.

— Remarque très-judicieuse ! s’écria le capitaine. M. Dodge a beaucoup de mérite comme écrivain, car il ne perd aucune occasion d’appuyer ses opinions sur des faits qui sont incontestables. Il a pris du goût pour Zip Coon, et pour Long-Tail-Blue, et il n’est pas étonnant qu’il n’ait que du mépris pour vos artistes inférieurs.

— Quant à la danse, continua M. Dodge, mon opinion bien décidée est que rien ne peut être pire. Le mouvement aurait mieux convenu a un enterrement qu’à un bal ; et j’affirme, sans crainte d’être contredit, qu’il n’y a pas une assemblée dans toute l’Amérique dans laquelle on n’aurait dansé un cotillon dans la moitié du temps qu’on mit à en danser un dans le baly.

— Dans le quoi ?

— Je crois que je n’ai pas donné à ce mot la véritable prononciation parisienne, Mamzelle, et qu’en France on le prononce balai.

— M. Dodge, comme capitaine de ce bâtiment, je vous offre les remerciements réunis, ou, comme le dirait Saunders, condensés, de tous les passagers pour tout ce que vous venez de nous apprendre, et nous espérons que samedi prochain vous nous accorderez le renouvellement du même plaisir. Mais comme ces dames paraissent avoir envie de dormir, que ces messieurs ne boivent plus, et que M. Lundi ne boit jamais, nous ferons bien de nous séparer, afin de nous préparer à la besogne dont il faudra s’occuper demain.

Le capitaine Truck avait fait cette proposition parce qu’il voyait que M. Dodge et M. Lundi avaient bu autant de punch que leur tête en pouvait porter, et que miss Effingham et sa compagne pensaient qu’il convenait qu’elles se retirassent. Il était vrai aussi qu’il sentait la nécessité du repos pour être en état de se livrer aux travaux importants du lendemain.

Lorsqu’on se fut séparé, au grand déplaisir de MM. Dodge et Lundi, mademoiselle Viei’ville passa une heure dans le salon d’Ève, et fit beaucoup de plaintes fort inutiles sur la manière dont l’éditeur du Furet Actif avait vu les choses à Paris ; et elle lui fit en outre plusieurs questions sur ses occupations et son caractère.

— Je ne sais trop, ma chère demoiselle, répondit Ève, si je suis en état de vous faire une description scientifique de l’individu que vous jugez digne de toutes ces questions ; mais à l’aide de ce que j’ai appris de mon cousin John, et de quelques mots échappés à M. Blunt, je