Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/220

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pourrait monter à bord ; et en renversant une couple de planches, ce serait comme lever un pont-levis ! Mais regardez là-bas ! il y a quelque chose qui remue à terre à peu de distance du rivage, ou mes yeux ne sont bons à rien.

M. Leach regarda dans la direction indiquée, et s’imagina aussi voir quelque chose en mouvement. À l’endroit ou était le bâtiment échoué, le rivage n’avait pas une très-grande étendue, et le bâton de clin-foc qui était encore en place s’avançait si près de la petite hauteur qui mettait la côte au niveau du désert, qu’il n’était qu’à dix pieds de quelques buissons qui croissaient sur les bords. Quoiqu’il fût un peu penché, n’étant plus soutenu par les étais, le bout en était encore assez haut pour s’élever au-dessus des feuilles, et permettre à un homme qui y serait placé de voir la plaine aussi bien que le permettait la lueur des étoiles. Considérant cet examen comme très-important, le capitaine donna d’abord ses instructions à M. Leach sur la manière dont il devrait donner l’alarme à l’équipage, si la nécessité l’y obligeait ; et monta ensuite avec précaution sur le beau ; et de là par le moyen des manœuvres jusqu’à l’extrémité du bâton de clin-foc. Comme il fit tout cela avec la fermeté d’un marin et en prenant toutes les précautions possibles pour qu’on ne pût le découvrir, il y fut bientôt étendu, laissant pendre ses jambes pour maintenir son corps en équilibre, et jeta de tous côtés des regards attentifs, quoi qu’il ne pût voir ni bien loin, ni très-distinctement, attendu l’obscurité.

Après être resté une minute dans cette position, le capitaine Truck découvrit sur la plaine, à environ cinquante toises des buissons, un objet qui était évidemment en mouvement. Il ne le perdit plus de vue ; car, quand même il n’aurait pas eu des preuves que les Arabes étaient déjà venus à bord du bâtiment danois, il savait qu’il en rôdait souvent des bandes le long de la côte, surtout quand il y avait eu de forts coups de vent venant de l’ouest, dans l’espoir de trouver quelque butin. Comme tout son équipage dormait, à l’exception de M. Leach, et qu’il pouvait à peine découvrir ses embarcations, lui qui en connaissait la position, il espéra que s’il y avait des Arabes dans les environs, ils ne s’apercevraient pas qu’il s’y trouvât aussi des étrangers. Il est vrai que le changement opéré dans la mâture devait frapper quiconque avait, déjà vu le bâtiment ; mais on pouvait croire que ce changement avait été fait par une autre troupe de maraudeurs, et d ailleurs il était possible que ceux qui arrivaient, s’il arrivait quelqu’un, vissent le bâtiment pour la première fois.

Tandis que de pareilles idées se succédaient rapidement dans l’es-