Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/351

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avis. Tous les deux lui conseillèrent la persévérance. Mais comme l’avis du premier fera connaître en peu de mots la situation des choses, nous rapporterons ses propres termes.

— Par l’indécision, dit-il, on décourage toujours ses amis et on en courage ses ennemis, et c’est pourquoi je recommande la persévérance. Plus nous approcherons des rochers, plus nous les commanderons, et plus nous diminuerons les chances qu’ont les Arabes de faire tomber leurs balles sur notre pont. Aussi longtemps que nous avancerons, le cap au vent, ceux qui sont sur les rochers du côté du nord ne peuvent tirer assez bas pour nous atteindre ; et du côté du sud ils n’oseront se hasarder bien près, faute d’abri. Il est vrai que nous ne pouvons enverguer nos voiles, ni envoyer une embarcation en avant en face d’un feu si constant ; mais nous pourrons peut-être les déloger à l’aide de notre canon ou de nos fusils. Dans le cas contraire, je conduirai quelques hommes dans les hunes, et de là je me charge de les faire reculer hors de la portée de nos mousquets en cinq minutes.

— Ce serait un service très-dangereux pour ceux qui se hasarderaient dans les hunes.

— Il ne sera pas sans péril, et il peut nous causer quelque perte ; mais quand on combat il faut s’attendre à quelque risque. En ce cas, c’est à M. Leach et à moi qu’il appartient de conduire nos marins dans les hunes. — Diable ! si c’est notre devoir de consoler les mourants, nous avons droit au privilège de combattre les vivants.

— Sans doute, capitaine, sans doute, dit M. Leach ; cela est conforme à la raison.

— Je respecte trop vos droits, Messieurs, pour vouloir les usurper, dit Paul avec douceur ; mais il y a trois hunes, et nous pouvons en prendre chacun une. L’effet sera proportionné au plus ou moins de moyens que nous emploierons. Une attaque vigoureuse en vaut une douzaine de fausses.

Le capitaine serra cordialement la main de Paul, et lui dit qu’il suivrait son avis. Quand le jeune homme se fut retiré, il se tourna vers son aide et lui dit :

— Il faut avouer, après tout, que les hommes qui ont servi à bord d’un vaisseau de guerre sont un peu plus avancés que nous dans la science de l’attaque et de la défense, quoique je pense que je pourrais leur apprendre quelque chose dans celle des signes. Dans mon temps, j’ai servi deux ou trois fois à bord de lettres de marque ; mais pour ce qui est de lâcher des bordées, je n’ai jamais eu d’occupations