Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parfaitement, même tandis que le premier faisait les protestations les plus sérieuses de vouloir remplir ses devoirs ; on fit placer sa barque le long du bord, et après avoir glissé quelques mots sur les bas-fonds et les courants, par forme d’avis, le digne pilote du port y descendit : on le vit bientôt derrière la poupe, ce qui était la preuve agréable que le Montauk faisait du chemin. Jusqu’à ce qu’il fût hors de portée de la voix, le brave homme ne cessa de crier : Songez à virer à temps !

— Si vous voulez essayer la vitesse de votre barque contre celle du pilote, monsieur Grab, dit le capitaine, vous n’en aurez jamais une plus belle occasion. Il fait une belle nuit pour des régattes, et je gagerais une livre sterling pour les talons de M. Handlead contre les vôtres ; et quant à cela, j’en dirais autant de sa tête et de ses bras par-dessus le marché.

L’officier de justice persista obstinément à rester à bord. Il voyait que l’embarcation à six rames continuait à s’avancer vers le Montauk ; et comme il savait combien il était important pour son client d’obtenir, de gré ou de force, la ratification du compte qu’il devait rendre, il s’imaginait qu’il pouvait attendre quelque secours de ce côté. Pendant ce temps, ce nouveau mouvement de la part de ceux qui poursuivaient les deux époux attira l’attention générale, et l’intérêt que fit naître cet incident augmenta l’agitation qui accompagne ordinairement l’instant du départ pour un long voyage sur mer. Les hommes et les femmes oublièrent leurs chagrins et leurs adieux pour s’occuper de ce nouveau sujet d’inquiétude, et pour goûter ce plaisir qui accompagne d’ordinaire l’agitation d’esprit quand elle n’a, pas pour cause des malheurs personnels.


CHAPITRE IV.


Où allez-vous si vite ? — Que Dieu vous protège ! Nous allons nous informer de ce que deviendra le grand duc de Buckingham.
Henri viii



Le rassemblement des passagers sur un grand paquebot est nécessairement un moment de froideur et de méfiance, surtout pour ceux qui connaissent le monde, et plus particulièrement encore quand il s’agit d’une traversée d’Europe en Amérique. La civilisation de l’ancien monde, plus avancée que celle du nouveau, avec les vices qui en sont la suite ; — la connaissance que le flux de l’émigration se dirige vers l’ouest, et que peu de gens abandonnent le