Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/218

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— N’est-ce que cela ? Vous n’aviez pas besoin de tant vous presser pour une telle bagatelle, Ordéal. Faites mes compliments à votre mère, et dites-lui qu’elle est la bien venue à prendre mon nom, et je désire qu’il lui soit utile.

— Ma’ dit qu’elle est disposée à payer le prêt de votre nom, si vous voulez lui dire quel sera le montant du dommage.

— Oh ! ce n’est pas la peine de parler d’une bagatelle semblable ; j’ose dire qu’elle me le rendra aussi bon que je le lui prête. Je ne suis pas assez mauvaise voisine et assez aristocrate pour vouloir garder mon nom pour moi seule. Dites à votre mère que je le lui prête avec plaisir, et qu’elle peut le garder tant qu’elle voudra, et qu’elle ne songe pas à rien payer pour cela. Je puis avoir à emprunter le sien ou quelque autre chose un de ces jours ; quoique, pour dire la vérité, mes voisins me reprochent de me conduire en femme fière, parce que je ne leur emprunte pas aussi souvent qu’une bonne voisine devrait le faire.

Ordéal partit, laissant mistress Abbot dans une situation à peu près semblable à celle de l’homme qui n’avait pas d’ombre. Un coup frappé à la porte l’empêcha de reprendre sa première discussion avec sa servante, et M. Steadfast Dodge se montra dès que le mot « entrez » eut été prononcé. En fait de nouvelles, M. Dodge et mistress Abbot avaient de grands rapports : il vivait en les publiant, et elle en les débitant.

— Vous êtes le bien venu, monsieur Dodge, dit la maîtresse de la maison ; j’ai appris que vous avez passé la journée d’hier chez les Effingham.

— Oui, mistress Abbot ; les Effingham ont insisté si fortement que je n’ai pu me dispenser de faire ce sacrifice, après avoir été si longtemps leur compagnon de voyage. D’ailleurs, c’est une sorte de soulagement de trouver à parler un peu français, quand on a été dans l’habitude de le parler tous les jours pendant des mois entiers.

— On m’a dit qu’il y a compagnie chez eux.

— Seulement deux de nos compagnons de voyage : — un baronnet anglais et un jeune homme dont on ne sait rien. C’est un personnage mystérieux, mistress Abbot, et je déteste le mystère.

— Nous nous ressemblons en cela, monsieur Dodge. Je crois que chacun devrait savoir tout. Ce n’est pas dans un pays libre qu’il doit y avoir des secrets. Je ne cache rien à mes voisins, et