Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/379

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— Vous aurez besoin de peu de mots pour tout n’apprendre, Mabel, car un homme habitué aux infernales ruses des sauvages n’a pas grand besoin d’explications sur un pareil sujet. Quant à l’expédition, elle a eu le succès que nous espérions, car le Serpent était à la découverte, et il nous donna toutes les informations qui nous étaient nécessaires. Nous avons dressé des embuscades à trois bateaux, et après en avoir pris possession et chassé les Français qui s’y trouvaient, nous les avons coulés à fond dans la partie la plus profonde du canal, suivant les ordres que nous avions reçus. Les sauvages du haut Canada seront privés des marchandises françaises cet hiver. La poudre et les balles seront aussi plus rares parmi eux que de bons chasseurs et des guerriers actifs ne le désireraient. Nous n’avons pas perdu un homme ni eu de tête scalpée. Je ne crois pas que l’ennemi ait beaucoup souffert de son côté. Enfin, Mabel, cette expédition a été comme Lundie les aime : nous avons fait beaucoup de tort à l’ennemi, et nous avons peu souffert nous-mêmes.

— Oh ! Pathfinder, je crains que lorsque le major Duncan viendra à apprendre cette triste affaire, il ne regrette avec raison de l’avoir entreprise.

— Je sais ce que vous voulez dire, je sais ce que vous voulez dire ; mais en vous racontant toute mon histoire, je crois que vous me comprendrez mieux. Aussitôt que le sergent eut obtenu quelque succès, il m’envoya, ainsi que le Serpent, dans des pirogues pour vous dire comment les choses avaient tourné ; et il doit nous suivre avec les deux bateaux qui, étant beaucoup plus lourds, ne pourront arriver avant demain matin. Je me suis séparé de Chingashgook cet après-midi ; nous étions convenus qu’il prendrait un côté des passages et moi l’autre, afin de voir si le chemin était libre. Je n’ai pas vu le chef depuis.

Mabel, alors, expliqua la manière dont elle avait découvert le Mohican, et son espérance de le voir arriver dans le fort.

— Lui, lui, oh ! non ; un vrai batteur d’estrade ne se mettra jamais derrière des murailles de pierres ou de troncs d’arbres, tant qu’il pourra rester en plein air et s’y occuper utilement. Je ne serais pas venu moi-même, Mabel, si je n’avais promis au sergent de vous encourager, et de veiller à votre sûreté. Ah ! bon Dieu ! j’ai eu le cœur bien serré cet après-midi, en faisant la reconnaissance de l’île ; et ce fut une bien amère pensée que la supposition que vous pouviez être au nombre des morts.