Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/426

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Ma foi, c’est un peu fort, ceci, — grommela Sanglier entre ses dents.

— Ne me parlez ni de pavillons ni de signaux lorsque je connais le cœur, — reprit Pathfinder. — Jasper a le sentiment de la probité, et c’est un don trop rare pour s’en jouer comme de la conscience d’un Mingo. Non, non, laissez-le en repos, ou nous verrons qui se battra le mieux, vous et vos soldats du 55e, ou le Serpent que voilà et Tue-daim avec Jasper et son équipage. Vous vous exagérez votre force, lieutenant Muir, autant que vous rabaissez la sincérité d’Eau-douce.

Très-bon ! — dit Sanglier.

— Hé bien ! s’il faut que je parle clairement, Pathfinder, je le ferai. Le capitaine Sanglier ici présent, et Arrowhead, ce brave Tuscarora, m’ont informé tous deux que ce malheureux jeune homme est le traître. Après un tel témoignage, vous ne pouvez contester plus long-temps mon droit de le punir, et la nécessité de le faire.

Scélérat ! — murmura le Français.

— Le capitaine Sanglier est un brave soldat et il ne voudra pas calomnier un honnête marin, — dit Jasper. — Se trouve-t-il un traître ici, capitaine Cœur-de-pierre ?

— Oui, — ajouta Muir, — qu’il parle sans détour, puisque vous le désirez, malheureux jeune homme, et que la vérité soit connue ! J’espère seulement que vous pourrez échapper au dernier châtiment, lorsqu’une cour martiale s’assemblera pour vous juger. Capitaine, voyez-vous ou ne voyez-vous pas un traître parmi nous ?

Oui, oui, monsieur, bien sûr.

— Mentir beaucoup trop ! — dit Arrowhead d’une voix de tonnerre, en frappant la poitrine de Muir du revers de sa main, avec un emportement irrésistible. — Où sont mes guerriers ! ou sont les chevelures des Yengeese ! Mentir beaucoup trop !

Muir ne manquait pas de courage personnel, ni d’un certain sentiment d’honneur relativement à lui-même. Il prit pour un coup l’acte de violence qui n’était qu’un geste dans l’intention d’Arrowhead ; sa conscience s’éveilla tout à coup, et, reculant d’un pas, il étendit le bras vers un fusil. Mais Arrowhead était trop agile pour lui. Le Tuscarora jeta un regard farouche autour de lui ; puis passant la main sous sa ceinture, il tira un couteau qu’il y tenait caché, et dans un clin d’œil l’enfonça jusqu’au