Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/443

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entendît le bruit de ses pas. Dunham écoutait avec un visage sans expression, car les liens qui l’attachaient à la vie étaient déjà si relâchés qu’il avait réellement oublié Arrowhead, et se souciait fort peu de Muir ; mais il demanda Eau-douce d’une voix faible. Le jeune homme, averti aussitôt, ne tarda pas à paraître. Le sergent le regarda avec affection, et on lisait dans ses yeux le regret des soupçons injustes qu’il avait conçus contre lui. Le fort était alors occupé par Pathfinder, Cap, Mabel, Jasper et le mourant. À l’exception de sa fille, tous étaient debout autour du lit du sergent en attendant son dernier soupir. Mabel agenouillée près de lui, tantôt passait sur son front une main couverte d’une sueur froide, tantôt humectait les lèvres brûlantes de son père.

— Votre position sera bientôt la nôtre, sergent, dit Pathfinder qui avait vu trop souvent les approches et les victoires de la mort pour être troublé, mais qui sentait combien elle était différente à contempler au milieu de l’ardeur du combat, ou dans la tranquillité du cercle domestique, et je ne mets pas en doute que nous ne nous rencontrions plus tard. Arrowhead est parti, il est vrai, mais il n’a pas suivi la route d’un Indien juste. Vous ne le verrez plus, car son sentier ne peut être le vôtre ; la raison s’oppose à ce qu’on puisse le croire en ce qui le concerne, et c’est aussi ce que je pense à l’égard du lieutenant Muir. Vous avez rempli votre devoir dans cette vie, et lorsqu’un homme se rend ce témoignage, il peut partir pour le plus long voyage avec un cœur tranquille et un pied agile.

— Je l’espère ainsi, mon ami ; j’ai tâché de faire mon devoir.

— Oui, oui, — dit Cap, — l’intention est la moitié du combat ; et quoique vous eussiez mieux fait de mettre en panne au large et d’envoyer un canot pour voir comment les choses se passaient sur terre, ce qui aurait pu donner une tournure différente à l’affaire, nul ne doute ici que vous n’ayez eu dessein de faire pour le mieux, et je pense qu’il en est de même partout ailleurs, d’après ce que j ai vu de ce monde et lu de l’autre.

— Oui, c’est vrai, j’ai eu dessein de faire pour le mieux.

— Mon père ! Ô mon bien-aimé père !

— Magnet est abattue par ce coup, maître Pathfinder ; elle ne peut rien dire ni rien faire pour soutenir son père au milieu des écueils ; nous n’en devons faire que plus d’efforts pour l’aider dans cette passe.