Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/432

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de l’espoir du salut et des joies du ciel ? — J’avoue que Colomb a surpassé de beaucoup toutes mes espérances, et qu’il a ouvert pour l’Espagne un tel avenir, que l’esprit sait à peine où poser des limites à l’idée qu’il s’en fait.

— Songez aux millions de pauvres Indiens qui peuvent pendant toute leur vie bénir l’instant où ils seront rangés sous notre domination, et reconnaître l’influence, recevoir les consolations de la sainte Église ?

— J’espère que notre voisin et parent, don Juan, ne nous causera aucun embarras dans cette affaire. Ces Portugais ont tant de goût pour les découvertes, qu’ils ne se soucient pas que d’autres puissances en fassent. On dit même que pendant que nos caravelles étaient dans le Tage, on a fait au roi de Portugal plusieurs propositions aussi dangereuses pour nous qu’elles étaient injustes.

— Colomb m’assure, Ferdinand, qu’il doute que ces Indiens aient aucune croyance religieuse ; de sorte qu’en présentant les vérités sublimes de l’évangile à la simplicité de leur esprit, nos prêtres n’auront aucuns préjugés à combattre.

— L’amiral a sans doute bien pesé tout cela. Il pense que l’île qu’il a appelée Española est presque aussi grande que la Castille, le Léon et l’Aragon réunis ; en un mot, que toutes nos possessions dans la Péninsule.

— As-tu remarqué ce qu’il nous a dit touchant la douceur et la bonté des habitants ? N’as-tu pas été frappé de l’air simple et confiant de ceux qu’il a amenés avec lui ? On pourra aisément apprendre à un tel peuple, en premier lieu, comme cela doit être, à adorer le seul vrai Dieu, le Dieu vivant ; secondement, à aimer et honorer ses souverains.

— L’autorité a toujours les moyens de se faire respecter, Isabelle, et don Christophe m’a assuré qu’un millier de bonnes lances suffiraient pour faire la conquête de toutes ces contrées de l’Orient. Il faudra nous adresser sans aucun délai au saint père, afin qu’il établisse entre don Juan et nous des limites qui préviennent toutes querelles relativement à ses intérêts et aux nôtres. J’en ai déjà dit un mot au cardinal, et il m’a donné à entendre qu’il a un grand crédit auprès du pape Alexandre.

— J’espère que les moyens de propager la religion de la croix ne seront pas oubliés dans cette négociation ; car je regrette de voir des hommes d’église traiter de choses temporelles, et négliger celles de leur divin maître.