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OU LE TUEUR DE DAIMS.

fut attribuée à la situation d’esprit de celle qui parlait, et qui, par son organisation, différait de la généralité de l’espèce humaine. Cependant un ou deux vieillards qui avaient entendu de semblables doctrines prêchées par les missionnaires eurent le désir de passer un moment d’oisiveté à continuer un récit qu’ils trouvaient si curieux.

— Est-ce là le Bon Livre des Faces-Pâles ? demanda un de ces chefs en prenant le volume des mains de Hetty, qui contempla ses traits avec anxiété pendant qu’il en tournait les pages, comme si elle eût attendu quelque résultat positif de cette circonstance. — Est-ce là la loi que mes frères blancs font profession d’observer ?

Hist, à qui cette question était adressée, si toutefois elle avait l’air d’être adressée à quelqu’un en particulier, fit une simple réponse affirmative, ajoutant que les Français du Canada, aussi bien que les Yankees des provinces anglaises, admettaient son autorité, et professaient d’en révérer les principes.

— Dites à ma jeune sœur, ajouta le Huron en tournant ses regards sur Hist, que j’ouvrirai la bouche pour dire quelques mots.

— Le chef iroquois va parler, mon amie Face-Pâle ; écoutez, dit Hist.

— Je m’en réjouis ! s’écria Hetty. Dieu a touché son cœur, et maintenant il laissera partir mon père et Hurry !

— Voici la loi des Faces-Pâles, reprit le chef : elle leur dit de faire du bien à ceux qui les blessent ; et, quand son frère lui demande son mousquet, de lui donner aussi sa poire à poudre. Telle est la loi des Faces-Pâles ?

— Non pas, non pas, répondit vivement Hetty lorsque ces paroles eurent été interprétées ; il n’est pas question de mousquets dans tout ce livre ; la poudre et les balles offensent le Grand-Esprit.

— Pourquoi donc les Faces-Pâles s’en servent-ils ? S’il est enjoint de donner le double à celui qui demande quelque chose, pourquoi prennent-ils le double aux pauvres Indiens qui ne demandent rien ? Ils viennent d’au-delà du soleil levant avec leur livre à la main, et ils apprennent à l’homme rouge à le lire. Mais pourquoi oublient-ils eux-mêmes tout ce que dit ce livre ? Quand l’Indien donne, l’homme blanc n’est jamais satisfait ; et maintenant il offre de l’or pour les chevelures de nos femmes et de nos enfants, quoiqu’ils nous appellent des bêtes sauvages si nous prenons la chevelure d’un guerrier tué en guerre ouverte. Mon nom est Rivenoak.

Quand elle eut l’esprit bien pénétré de cette formidable question, traduite par Hist avec plus de zèle cette fois qu’elle n’en avait mon-