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DEERSLAYER

Hetty rompit le silence ; et, à cette interruption, il cessa de ramer tout à coup.

— Pourquoi retournez-vous chez les Hurons, Deerslayer ? demanda-t-elle d’une voix douce et mélodieuse. On dit que je suis faible d’esprit, et c’est pour cela qu’ils ne me font aucun mal ; mais vous, vous avez autant de bon sens que Hurry Harry, et même davantage, à ce que dit Judith, quoique je ne voie pas comment cela est possible.

— Avant que nous débarquions, Hetty, il faut aussi que je vous dise quelques mots, et cela sur des choses qui touchent vos propres intérêts. Cessez de ramer, ou plutôt, pour que les Mingos ne nous soupçonnent pas de quelque manœuvre pour leur échapper, ce qui leur fournirait un prétexte pour nous traiter encore plus durement, ne faites que toucher l’eau légèrement d’une rame, pour que la pirogue ne reste pas tout à fait stationnaire. — C’est cela, précisément le mouvement qu’il faut. Je vois que vous ne manquez pas d’adresse pour saisir les apparences, et qu’on pourrait se servir de vous pour ruser, si la ruse nous était permise en ce moment. Hélas ! la fausseté et une langue menteuse sont de mauvaises choses, et ne conviennent nullement à notre couleur, Hetty ; et pourtant il y a du plaisir et de la satisfaction à vaincre une Peau-Rouge en astuce dans le cours d’une guerre légitime. Mon voyage dans ce monde a été court, car il est probable qu’il touche à sa fin ; mais je puis voir qu’un guerrier ne marche pas toujours à travers les ronces et les épines. Le sentier de guerre à son beau côté, comme beaucoup d’autres choses. Il faut seulement avoir la sagesse de le voir et la fermeté de s’y maintenir.

— Et pourquoi votre sentier de guerre, comme vous l’appelez, Deerslayer, serait-il si près de sa fin ?

— Parce que mon congé approche de la sienne, ma bonne fille, et qu’il est probable qu’ils se termineront à peu près en même temps, l’un marchant tout naturellement sur les talons de l’autre.

— Je ne sais ce que vous voulez dire, Deerslayer. Ma mère me disait toujours qu’on devait me parler plus clairement qu’à beaucoup d’autres, parce que je suis faible d’esprit. Ceux qui ont l’esprit faible ne comprennent pas aussi facilement que ceux qui ont du bon sens.

— Eh bien ! Hetty, je vais vous dire la vérité toute simple. Vous savez que je suis en ce moment prisonnier des Hurons, et les prisonniers ne peuvent pas faire toujours ce qu’il leur plaît.

— Mais comment pouvez-vous être prisonnier quand vous êtes