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DEERSLAYER

chambre. La pauvre Hetty avait été placée sur son lit, moitié couchée, moitié assise, sa physionomie annonçant l’approche de la mort, mais adoucie par l’expression de ses traits, dans lesquels semblait concentrée toute l’intelligence qu’elle avait jamais possédée. Judith et Hist étaient près d’elle, la première assise, et plongée dans une profonde affliction ; la seconde debout, et lui prodiguant des soins malheureusement inutiles. Deerslayer était debout au pied du lit, appuyé sur Killdeer. L’ardeur martiale dont ses traits avaient brillé la veille s’était éclipsée, et il avait repris son air habituel de franchise et de bienveillance, auquel se joignait une expression de regret et de pitié. Le Grand-Serpent était à l’arrière-plan du tableau, droit et immobile, mais observateur si attentif que rien de ce qui se passait ne lui échappait. Hurry complétait le groupe, assis sur une escabelle près de la porte, comme un homme qui se sentait déplacé dans une telle scène, mais qui aurait eu honte de s’y soustraire sans motif.

— Qui est cet homme en habit écarlate ? demanda Hetty dès qu’elle eut aperçu l’uniforme du capitaine. — Est-ce l’ami de Hurry, Judith ?

— C’est l’officier qui commande le détachement qui nous a sauvés tous des mains des Hurons, répondit Judith à voix basse.

— Suis-je sauvée aussi ? je croyais que j’allais mourir du coup de fusil que j’ai reçu. Au surplus, ma mère est morte, mon père aussi ; mais vous vivez, Judith, ainsi que Hurry. Je craignais qu’il ne fût tué, quand j’ai reconnu sa voix au milieu des soldats.

— Ne vous inquiétez pas, chère sœur, s’écria Judith, craignant en ce moment, peut-être plus qu’en tout autre, que sa sœur ne trahît son secret ; — Hurry se porte bien, ainsi que Deerslayer, et le Delaware aussi.

— Mais comment se fait-il qu’ils aient tiré sur une pauvre fille comme moi, et qu’ils aient laissé aller tant de soldats sans leur faire aucun mal ? Je ne croyais pas que ces Hurons fussent si méchants.

— C’est par accident, ma pauvre Hetty, par un accident bien malheureux. Aucun d’eux ne vous aurait fait le moindre mal volontairement.

— J’en suis charmée. — Cela me semblait étrange. Les hommes rouges ne m’avaient jamais fait aucun mal jusqu’ici ; je serais fâchée de croire qu’ils aient changé de conduite. — Je suis bien contente aussi, Judith, qu’ils n’aient pas blessé Hurry. — Je ne crois pas que Dieu permette jamais qu’il arrive aucun malheur à Deerslayer.