Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/417

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Tout annonçait dans le camp américain qu’on touchait à l’instant d’une bataille. À quelques milles de distance, le bruit du canon et de la mousqueterie se faisait entendre par-dessus celui de la cataracte. Les troupes furent bientôt mises en marche, et l’on fit un mouvement pour soutenir la division qui était déjà engagée. La nuit était tombée avant que la réserve et les troupes irrégulières eussent atteint le pied de Lundy’s-Lane, chemin qui, s’éloignant de la rivière, passe sur une éminence de forme conique, à peu de distance de la grande route conduisant au Niagara. Le sommet de cette hauteur était couronné par une batterie anglaise, et dans la plaine au-dessous étaient les restes de cette intrépide brigade écossaise qui avait longtemps soutenu un combat inégal avec une bravoure distinguée. On lui opposa une nouvelle ligne, et une brigade américaine fut chargée de gravir la montagne parallèlement à la route. Cette colonne prit les Anglais en flanc, et les attaquant à la baïonnette, elle s’empara de la batterie. Les Américains furent joints aussitôt par leurs camarades, et l’ennemi fut débusqué de la hauteur. Mais le général anglais recevait des renforts à chaque instant, et ses troupes étaient trop braves pour céder si facilement la victoire. Les Anglais firent plusieurs charges sanglantes pour se remettre en possession de leur batterie ; mais ils furent toujours repoussés avec perte.

Dans la dernière de ces charges, l’ardeur du jeune capitaine dont nous avons parlé l’entraîna à quelque distance en avant avec sa compagnie pour disperser un peloton ennemi qui tenait encore ferme. Il réussit dans son entreprise ; mais en rejoignant la ligne, il s’aperçut que son lieutenant n’était pas à la place qu’il aurait dû occuper. Peu de temps après cette charge, qui termina le combat, des ordres furent donnés aux troupes dispersées de retourner au camp. Les Anglais avaient abandonné le champ de bataille, et l’on se disposa à relever les blessés qui pouvaient être transportés. En ce moment Wharton Dunwoodie, inquiet pour son ami et pressé par son affection, saisit une torche, et se faisant suivre par deux soldats, alla le chercher dans l’endroit où il supposait qu’il avait pu tomber. Il trouva Mason assis sur le revers de la montagne, ayant l’air fort calme, mais ne pouvant marcher parce qu’il avait une jambe cassée. Dunwoodie l’aperçut, courut à lui, et s’écria :

— Ah ! mon cher Tom ! je savais que c’était vous que je trouverais le plus près de l’ennemi !