Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/137

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cette idée le tourmenta lui-même. Il lui semblait voir un mourant implorer son aide, sans qu’il fût en son pouvoir de venir à son secours. Il était impossible à un homme aussi généreux que sir Gervais de concevoir une telle pensée, sans faire un nouvel effort, et il se rapprocha du lit du malade, déterminé à tâcher d’obtenir de lui quelque chose de plus intelligible.

— Croyez-vous, sir Wycherly, lui demanda-t-il, comme par dernière ressource, que vous pourriez écrire quelques mots, si nous placions devant vous encre, plume et papier ?

— Impossible, — je vois à peine, — je n’ai plus de force. — Attendez pourtant, — j’essaierai.

Sir Gervais fut enchanté de la résolution du baronnet, et il appela sur-le-champ ses compagnons à son aide. Atwood et le ministre soulevèrent le vieillard, et empilèrent des coussins derrière lui pour le soutenir, tandis que le vice-amiral plaçait devant lui, en guise de pupitre, une grande Bible, sur laquelle il mit papier, plume et encre. Sir Wycherly prit la plume d’une main tremblante, et, après plusieurs tentatives infructueuses, traça sur le papier, en ligne diagonale, quelques mots illisibles. Mais il n’en put faire davantage ; les forces lui manquèrent tout à fait, la plume lui tomba des mains, et il tomba, presque sans connaissance, entre les bras de ceux qui le soutenaient.

En ce moment critique, le chirurgien entra, et il mit fin à l’entrevue en demandant qu’on le laissât seul avec le malade et un ou deux domestiques.

Les trois témoins de ce qui venait de se passer se retirèrent alors dans une salle au rez-de-chaussée. Atwood, qui, presque machinalement, avait emporté par habitude le papier sur lequel le baronnet avait griffonné quelques mots, le mit alors entre les mains du vice-amiral, comme il lui aurait présenté une lettre à signer, ou une copie d’une dépêche adressée au secrétaire de l’amirauté.

— Ceci ne vaut pas mieux que le nullus, s’écria sir Gervais après avoir inutilement essayé de déchiffrer ce griffonnage. Quel est le premier mot, monsieur Rotherham ? je crois qu’il a voulu écrire irish. — Eh ! Atwood ?

— Je pense que c’est seulement in, dit le ministre, étendu sur beaucoup plus de papier qu’il n’en fallait.

— Je crois que vous avez raison. Le second mot est évidemment the, quoiqu’il ressemble assez à des chevaux de frise. Mais quel est le troisième ? je crois lire man of war, Atwood ?

— Je vous demande pardon, sir Gervais. La première lettre est ce que j’appellerais une n allongée ; la seconde est certainement un a ;