Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/181

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tés, le nouveau venu se tourna vers le contre-amiral, et lui dit d’un air plus ouvert :

— Et vous aussi, sir Richard Bluewater ! Je suis charmé de trouver une ancienne connaissance dans une circonstance si mélancolique.

— Je suis enchanté de vous voir, sir Réginald ; mais vous me donnez un titre auquel je n’ai aucun droit.

— Que voulez-vous dire ? J’ai lu dans les journaux qu’on vous a envoyé le ruban rouge, avec les insignes de l’ordre du Bain.

— Je crois que… qu’on a eu quelque idée de me faire cet honneur…

— Quelque idée ? Je vous assure que le fait a été positivement annoncé dans la gazette officielle, et je puis vous la montrer, si vous me permettez de l’envoyer chercher dans ma voiture.

— Excusez-moi, sir Reginald ; il y a une petite méprise dans cette affaire, et je préfère rester tout simplement le contre-amiral Richard Bluewater. Tout cela s’expliquera en temps convenable.

Leurs yeux se rencontrèrent, et leur langage, dans le temps où ils vivaient, était assez intelligible pour qu’ils se comprissent mutuellement. Ni l’un ni l’autre ne parla plus de ce sujet ; mais, avant d’abandonner la main qu’il tenait, sir Reginald la serra cordialement, et Bluewater y répondit par une pression semblable. La conversation tomba alors sur sir Wycherly, sur sa situation présente, et sur le motif qu’il pouvait avoir pour désirer de voir son parent. Sir Gervais, sans s’inquiéter de la présence de Tom Wychecombe, déclara que ce motif était de faire un testament, et de nommer sir Reginald son exécuteur testamentaire, ou peut-être de lui donner dans cet acte une qualité encore plus intéressante.

— On m’a donné à entendre, continua le vice-amiral, que sir Wycherly a dans les fonds publics une somme considérable, qui est entièrement à sa disposition ; et j’avoue que j’aime à voir un homme, dans ses derniers moments, songer avec générosité à ses amis et à ses serviteurs. Le domaine est substitué, à ce qu’on m’a dit, et quelque emploi que fasse notre ami du fruit de ses économies, M. Thomas Wychecombe que voici ne pourra s’en trouver fort à plaindre.

Sir Gervais avait tellement l’habitude du commandement, qu’il ne sentait pas combien pouvait paraître étrange son intervention dans les affaires d’une famille à laquelle il était presque entièrement étranger ; mais cette circonstance parut un peu singulière à sir Reginald.