Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/371

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— Avez-vous bien examiné l’horizon ce matin, maître Galleygo ? demanda sir Gervais, relevant la tête qu’il venait de plonger dans un bassin plein d’eau, car il était déjà à demi-vêtu, et il faisait ses préparatifs pour se raser. Quand nous étions à bord d’une frégate, vous aviez coutume d’avoir l’œil bon pour suivre une chasse, et vous devriez être en état de me dire si Bluewater est en vue.

— L’amiral Bleu ! Eh bien ! sir Gervais, cela est remarquable ; mais j’avais effacé sa division de mon loch, et je l’avais complètement oubliée. Oui, il y avait au point du jour une poignée de bâtiments là-bas du côté du nord ; mais je ne croyais pas que ce pût être l’amiral Bleu, étant plus naturel de supposer qu’il aurait pris sa place ordinaire en arrière de notre ligne. Mais voyons, Votre Honneur, combien de vaisseaux avons-nous laissés à l’amiral Bleu ?

— Les cinq vaisseaux à deux ponts de sa division, le Ranger et la Mouche, sept voiles en tout.

— C’est justement cela. Eh bien ! sir Gervais, il y avait là-bas du côté du nord, comme je viens de vous le dire, cinq grands bâtiments, et il peut se faire que ce soit l’amiral Bleu avec sa division.

Sir Gervais avait alors le visage couvert de savon, mais il l’oublia en ce moment. Comme le vent était au nord-ouest, et que le Plantagenet voguait tribord amures, le cap dans la direction du Bill de Portland, mais beaucoup trop au sud pour apercevoir la terre, la fenêtre de sa bouteille de bâbord commandait la vue de tout l’horizon au vent. Sortant rapidement de la chambre du conseil à tribord, qu’il occupait ex officio, il ouvrit la fenêtre lui-même et jeta un coup d’œil sur la mer. Il y vit effectivement une escadre de cinq vaisseaux en ligne serrée, faisant route en dépendant vers les deux divisions, sous leurs huniers, et à une distance suffisante pour pouvoir s’assurer que leurs basses voiles n’étaient pas dehors. Cette vue produisit un changement soudain dans tous les mouvements du vice-amiral ; il reprit à la hâte l’affaire de sa toilette, et faucha sa barbe à grands coups de rasoir, ce que le roulis d’un bâtiment aurait pu rendre hasardeux pour tout autre qu’un marin expérimenté. Cette opération importante était à peine terminée quand Locker annonça le capitaine Greenly.

— Eh bien ! Greenly, qu’y a-t-il ? s’écria le vice-amiral en s’essuyant le visage après une dernière ablution ; quelles nouvelles de Bluewater ?

— Je suis charmé, sir Gervais, d’avoir à vous dire qu’il est en vue depuis plus d’une heure, et qu’il s’approche de nous, quoique très-lentement et avec circonspection. Comme tout allait bien, je n’ai pas