Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/79

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vous réponds, Monsieur, qu’il ne faudrait que Wychecombe et un ou deux manoirs voisins pour lui donner son compte.

— Cela pourrait dépendre des circonstances, répondit le vice-amiral d’un ton un peu sec. Ces Écossais ont une arme qu’ils nomment claymore et qu’ils savent manier, et ce sont des drôles déterminés, dit-on, en marchant à la charge. Le seul fait d’armer un soldat d’un sabre à lame courte annonce des dispositions sanguinaires.

— Vous oubliez, sir Gervais, que nous avons ici, dans l’ouest de l’Angleterre, le croc-en-jambes du Cornouailles, et nous mettrons ces braves gens en face de tout régiment écossais qui ait jamais chargé un ennemi.

Tom rit de nouveau en faisant allusion à une manière de lutter habituelle dans le comté voisin.

— Tout cela est fort bien, monsieur Thomas Wychecombe, aussi longtemps que le Devonshire sera dans l’ouest de l’Angleterre, et l’Écosse de l’autre côté de la Tweed. Dans tous les cas, sir Wycherly ferait sagement de laisser l’affaire entre les mains du duc et de ses troupes régulières, quand ce ne serait que pour que chacun fît son métier.

— Je trouve quelque chose de si singulièrement insolent dans la conduite d’un homme d’ignoble naissance comme ce prétendant à la couronne d’Angleterre, que je puis à peine en parler avec patience. Nous savons tous que son père était un enfant supposé, et le fils d’un enfant supposé ne peut avoir plus de droits que le père lui-même. Je ne me rappelle pas quel nom la loi donne à ces enfants supposés, mais j’ose dire que c’est un terme suffisamment odieux.

Filius nullius, Thomas, dit le vieux baronnet, n’étant pas fâché de montrer son érudition. C’est la véritable expression. Je le tiens de bonne part, – de la propre bouche de feu mon frère le baron de Wychecombe, dans une occasion où il était nécessaire que je comprisse bien cette matière. Le juge était excellent jurisconsulte, particulièrement en tout ce qui concerne les termes techniques, et je suis sûr que, s’il vivait encore, il vous dirait que les mots filius nullius sont la dénomination légale qui doit s’appliquer à un enfant supposé.

En dépit de son impudence naturelle et de sa détermination bien prononcée de faire son chemin dans le monde sans s’inquiéter de la vérité, Tom sentit que ses joues étaient si brûlantes, qu’il fut obligé de tourner la tête pour cacher sa confusion. Si cette remarque eût impliqué le reproche de quelque faute morale par lui commise, il aurait su y opposer un front d’airain mais, comme cela n’arrive que