Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 21, 1844.djvu/310

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rière, les mains derrière le dos et la tête baissée. Tous ceux qu’il rencontrait, s’empressaient de lui faire place, et il parcourut ainsi toute la longueur de son vaisseau, comme un homme déclaré tabou dans les îles de la mer Pacifique du Sud. Winchester lui-même respecta l’air d’abstraction de son commandant, quoiqu’il eût une demande à lui faire.

Andréa Barrofaldi et Vito Viti étaient encore à bord de la frégate, et ils s’habituaient de plus en plus à leur nouvelle situation. Ils n’échappaient pas tout à fait aux quolibets d’usage sur un bâtiment de guerre ; mais à tout prendre ils étaient bien traités, et n’avaient pas à se plaindre de leur situation, surtout quand l’espoir de capturer le Feu-Follet commença à renaître. Ils avaient nécessairement appris la condamnation prononcée contre Raoul, et étant au fond doués tous deux d’humanité et de compassion, ils désiraient le voir pour l’assurer qu’ils ne conservaient aucune rancune de la manière dont il les avait trompés. Ils s’étaient adressés à ce sujet à Winchester ; mais le premier lieutenant, avant de leur en accorder la permission, avait jugé à propos de consulter le capitaine. Enfin il en trouva l’occasion, Cuff étant sorti tout à coup de sa rêverie pour donner quelque ordre relativement à la voilure que portait son bâtiment.

— Nos deux Italiens, capitaine, dit Winchester, désirent voir le prisonnier ; mais je n’ai pas cru devoir permettre qu’il eût aucune communication avec personne sans savoir quel est votre bon plaisir, à cet égard.

— Le pauvre diable ! son temps devient bien court, à moins que nous n’ayons des nouvelles de Clinch, et il ne peut y avoir de risque à le traiter avec toute l’indulgence possible. J’ai beaucoup réfléchi sur cette affaire, Winchester, mais je ne puis trouver aucun moyen pour me dispenser d’ordonner l’exécution, à moins d’un contre-ordre de Nelson.

— Non, certainement, capitaine. — Mais M. Clinch est un marin plein d’expérience et d’activité, et malgré ce qu’on a à lui reprocher, il ne néglige jamais son devoir. Nous pouvons donc encore espérer que sa mission aura réussi. — Et les deux Italiens, capitaine ? Leur accorderai-je la permission qu’ils demandent ?

— Oui, ainsi qu’à tous ceux que ce pauvre Yvard peut désirer de voir.

— Y comprenez-vous le vieux Giuntotardi et sa nièce, et même notre déserteur Bolt ? Car il demande aussi à faire ses adieux à son ancien commandant.

— Il ne peut y avoir aucun doute pour les deux premiers, Win-