Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 23, 1845.djvu/120

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et le vieux madère me donnent la fièvre, et j’ai besoin d’une nuit de repos avant de rien conclure.

Le lendemain matin, Jacques Wallingford ramena la conversation sur ce sujet au déjeuner, repas que nous prenions toujours dans notre chambre pour être plus libres.

— J’ai ruminé ce sujet qui ne manque pas de douceur, les sucres, Miles, commença mon cousin, et j’approuve votre plan. Avez-vous quelques garanties que vous puissiez me donner, si je vous prête la somme ?

— J’ai sur moi pour vingt-deux mille dollars de créances et de rentes, qui pourraient y être affectés.

— Mais ce n’est pas une garantie suffisante pour les trente à trente-cinq mille dollars dont vous avez besoin pour courir l’aventure.

— C’est très-vrai ; mais c’est tout ce que je possède, sauf le navire et Clawbonny.

— Je ne donnerais pas ça du navire, dit mon cousin en faisant claquer ses doigts ; que vous et votre cargaison périssent, et adieu l’Aurore. Quant aux assurances, elles ne me vont pas. Je suis homme de terre, et ce sont de bonnes sûretés territoriales qu’il me faut. Vous allez me faire votre billet à trois ou à six mois, si vous voulez ; vous me donnerez les titres dont vous me parlez, ainsi qu’une hypothèque sur Clawbonny, et je vous compte aujourd’hui même quarante mille dollars, si vous en avez besoin.

Je fus surpris de cette offre, ne soupçonnant pas que mon cousin fût assez riche pour me prêter une somme aussi considérable. Dans le cours de la conversation, j’appris qu’il avait le double de la somme en question, en argent comptant, et que son principal commerce était de faire des avances sur de bons gages. Il consentait néanmoins à m’en prêter la moitié, afin d’aider un parent qu’il aimait. L’idée d’hypothéquer Clawbonny ne me plaisait nullement ; mais il se moqua de moi, et me fit voir que ce n’était rien du tout.

— Si cela devait sortir de la famille, ou même du nom, me dit-il, j’y regarderais moi-même à deux fois, Miles ; mais une hypothèque de vous à moi, c’est comme serait une hypothèque de moi à vous. Vous m’avez fait votre héritier, et, pour ne vous rien cacher, mon garçon, je vous ai fait le mien. Si vous perdez mon argent, c’est le vôtre que vous perdrez.

Comment résister à un raisonnement pareil ? La franchise appa-