Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 23, 1845.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui fis remarquer la figure principale, et je la renvoyai au catalogue pour le reste des noms.

— Qui eût jamais dit, bon dieu ! s’écria la bonne dame, que je vivrais assez pour voir la figure de tous ces saints personnages ! Kitty, ma chère, ce vieillard à la tête chauve, c’est saint Pierre. Auriez-vous jamais pensé que saint Pierre était chauve ? Et puis, voilà saint Jean, avec ses yeux noirs. Mais c’est qu’ils y sont tous vraiment !

Kitty était tout aussi étonnée que sa grand-mère, et le fils lui même partageait un peu leur surprise. Il finit par faire observer que « le monde allait de plus en plus de l’avant dans toutes ces sortes de choses ; et que quant à lui, il ne concevait pas où les peintres et les auteurs allaient chercher tout ce qu’ils peignaient. »

La matinée avait été bien employée. Vers une heure, je me séparai de mes compagnons, et j’entrai dans un café qui était le rendez-vous des négociants, pour manger une sandwich et boire un verre de porter. J’étais dans un des cabinets, dont les rideaux étaient fermés, quand une société composée de trois personnes entra dans le cabinet voisin, et demanda trois verres de punch ; c’était alors la boisson à la mode, et même un homme comme il faut pouvait se permettre d’en prendre avant dîner.

Comme les cabinets n’étaient séparés que par des rideaux, il était : impossible de ne pas entendre de l’un ce qui se disait dans l’autre, Surtout lorsque les personnes ne prenaient nullement la précaution de parler bas, ce qui était justement le cas pour mes trois voisins. Aussi reconnus-je sur-le-champ les voix d’André Drewett et de Rupert Hardinge ; celle du troisième interlocuteur m’était inconnue.

— Eh ! bien Norton, dit Rupert avec un peu d’affectation, vous êtes parvenu à nous entraîner, Drewett et moi, au milieu de tous vos marchands. J’espère que vous allez nous faire les honneurs de l’endroit d’une manière un peu soignée. Vous dites que c’est un café accrédité, tant mieux ; car un marchand sans crédit, c’est peu de chose.

— Ne craignez rien pour votre gentilhommerie, Rupert, répondit celui qu’on avait appelé Norton ; les personnes les plus distinguées de la ville viennent ici, et on y fait le punch mieux que partout ailleurs. À propos, Rupert, j’ai vu, l’autre jour, dans un journal, qu’une de