Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/119

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui donnèrent lieu, dans la suite, à tant de vigilance et d’activité.

— Tu tâcheras de nous faire savoir ton heureuse arrivée à Boston, Bob, dit le père ; j’espère de la bonté de Dieu que les choses n’iront pas plus loin, et que nos appréhensions ont donné une trop sombre apparence à ce qui s’est déjà passé.

— Ah ! mon cher père, que vous connaissez peu l’état du pays à travers lequel je viens de voyager, répondit le major en secouant la tête. Des cris au feu n’auraient pas produit plus de mouvement, ni plus d’excitation. Les colonies sont agitées, particulierement celles de la Nouvelle-Angleterre, et une guerre civile est inévitable ; du reste, je suis assuré que, grâce à la puissance de l’Angleterre, elle sera de courte durée.

— Alors, Robert, ne vous engagez pas parmi les habitants de la Nouvelle-Angleterre, s’écria la mère alarmée. Allez plutôt à New-York, où nous avons beaucoup d’amis et beaucoup d’influence. Il sera plus aisé de gagner New-York que Boston.

— C’est vrai, ma mère, mais ce serait peu honorable. Mon régiment est à Boston, les ennemis sont devant Boston ; un vieux soldat comme le capitaine Willoughby vous dira qu’un major est nécessaire à son corps. Non, non ; ce que j’ai de mieux à faire, c’est de me mêler aux aventuriers qui se dirigent vers Boston, jusqu’à ce que je puisse saisir l’occasion de me séparer d’eux et de joindre mon régiment.

— Prends garde, Bob, à ne pas commettre un crime militaire. Peut-être que les officiers provinciaux pourraient, d’après cela, te traiter comme un espion ; ne va pas tomber entre leurs mains.

— Je n’ai pas cette crainte, Monsieur ; actuellement, c’est le sort des colons de combattre pour ce qu’ils s’imaginent être la liberté. Ce dont ils sont capables dans leur zèle, je le sais pour l’avoir vu déjà ; mais les choses n’iront pas aussi loin que vous paraissez l’appréhender. Je crois qu’ils n’arrêteraient pas Gage lui-même si, après avoir traversé leur camp, il manifestait le désir de s’en retourner.

— Tu m’as cependant dit que des armes et des munitions ont été saisies ; que plusieurs officiers retraités du roi ont été arrêtés et faits prisonniers sur parole.

— Cela se dit certainement, mais j’en doute. Heureusement pour vous et pour vos présentes opinions, vous n’avez pas même la demi-solde que l’on donne aux retraités.