Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/165

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l’autre côté des broussailles, afin de donner au vieux gentleman l’occasion de jouer au soldat contre eux. S’ils gravissaient les palissades, j’ai le meilleur shilletah que des yeux mortels ait jamais vu. Il briserait une tête et même un casque. Mais ils ne portent pas de casque, cependant nous verrons.

— Je vous remercie, Mike, pour le courage que vous montrez et pour l’intérêt que vous prenez à notre bonheur. N’est-il pas trop tôt pour nous aventurer dans la plaine, Joël ? Je me fie à vous comme à un guide.

— Allons, Mike doit être averti de ne pas tant parler, ou tout au moins de parler moins haut. Quelquefois on pourrait l’entendre à douze verges de distance.

— Averti ! s’écria Mike avec chaleur ; et, ne m’avez-vous pas averti vingt fois déjà par vos paroles insinuantes. À quoi sert de redire une chose quand un homme a des oreilles ? Ce sont les gens comme vous qui aiment à parler.

— C’est bien, Mike ; à ma considération vous garderez le silence, j’espère, dit Maud. Souvenez-vous que je ne suis pas en état de me battre, et que la première chose est d’arriver en sûreté à la maison. Plus tôt nous atteindrons la montagne, et mieux cela vaudra.

— Prenez ce chemin, Joël, et je vous suivrai. Michel ira derrière vous et je formerai l’arrière-garde. Il vaudra mieux pour tous garder un silence de mort jusqu’à ce qu’il soit nécessaire de parler.

Cet arrangement fait, ils partirent, Maud restant un peu en arrière afin que le major pût se guider en la suivant dans les ténèbres de la forêt et ne pas se tromper de route. En quelques minutes ils arrivèrent au niveau de la plaine. Là, Joël, au lieu d’entrer dans les champs, se dirigea vers les bois en suivant toujours un des sentiers. Son intention était de traverser le ruisseau à couvert ; un endroit favorable se trouvait à une courte distance du point ou les eaux sortaient de la forêt ; arrivé là, Joël suivit tranquillement son chemin, s’arrêtant de temps en temps pour écouter si aucun mouvement d’importance ne se manifestait dans la plaine. Les yeux de Maud se dirigeaient fréquemment en arrière, car elle craignait que Robert Willoughby ne s’égarât à cause de son peu de connaissance des mille sinuosités du sentier qu’il parcourait. Mais il la suivait, et voyant qu’il était dans la bonne route, elle n’eut bientôt plus d’autre crainte que celle qu’il