Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/289

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dans le plus profond de son cœur, étaient grossièrement sondés par une main rude et maladroite. Quoiqu’elle en eût beaucoup dit dans sa dernière conversation avec le jeune soldat, elle en avait tant laissé à dire, qu’elle eut presque envie de s’agenouiller et de supplier Mike de s’expliquer. Malgré cela la réserve d’une femme lui fit garder le décorum de son sexe.

— Si le major Willoughby a désiré, que vous me communiquiez quelque chose en particulier, dit-elle en se composant un maintien, je suis prête à vous entendre.

— Nous étions obligés de parler tout bas, miss Maud, mais j’en sais assez pour le répéter, et voici la baguette que Nick m’a engagé à garder pour mieux me souvenir. C’est meilleur pour moi qu’un livre, dont je ne pourrais pas déchiffrer une syllabe. Mike, m’a dit le major, trouvez le moyen de voir seule la jolie miss Maud.

— La jolie miss Maud ! interrompit involontairement la jeune fille.

— Och ! c’est moi qui dis ça, et ce n’est pas sans raison. Ainsi, vous aurez la bonté de laisser passer cette phrase. Donc vous tâcherez, dit-il, de voir seule la jolie miss Maud, et surtout ne laissez connaître à personne ce que vous lui direz. Ceci a bien été dit par le major.

— C’est très-extraordinaire. Peut-être vaudrait-il mieux, Michel, que vous ne me disiez strictement que ce qui vient du major. La commission se ferait alors en aussi peu de mots que possible.

– Deux mots ! Mais ce ne sont pas des mots que j’ai à vous donner.

— Si ce ne sont pas des mots, qu’est-ce donc ? Ce ne sont pas des baguettes, sûrement ?

— C’est ceci, s’écria Mike avec triomphe ; c’est ce petit morceau d’argent qui vaut autant que quarante Indiens.

Mike mit une petite tabatière en argent dans les mains de Maud, qui la reconnut pour appartenir à Robert Willoughby ; pourtant il était probable que le messager ignorait ce que cela voulait dire.

La boîte était très jolie, et mistress Willoughby et Beulah avaient souvent ri aux dépens du major en le voyant posséder un objet qui était alors de rigueur pour un homme de bon ton, quand tous ses amis savaient qu’il ne prenait pas de tabac. En effet, il était si éloigné d’user de ce stimulant, qu’il n’avait jamais voulu mon-