Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/363

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domestique, et sur lequel était venue fondre la mort. Pendant ce temps, on prit des arrangements pour l’avenir. Beekman, instruit des sentiments qui existaient entre son beau-frère et Maud, leur conseilla de se marier immédiatement.

— Soyez heureux puisque vous le pouvez, leur dit-il. Nous vivons dans des temps de trouble, et le ciel seul sait quand tout ira mieux. Maud n’a pas de parents en Amérique, à moins que ce ne soit dans l’armée anglaise. Quoique nous soyons tous heureux de protéger et de chérir cette chère fille, elle préférera probablement se rapprocher de ceux que la nature lui a donnés pour amis. Elle sera toujours ma sœur et vous serez toujours mon frère. En vous mariant, toutes les apparences d’inconvenance seront évitées. Et plus tard, quand tout sera calmé, vous pourrez mettre votre femme en rapport avec ses parents anglais.

— Vous oubliez, Beekman, que vous parlez à un prisonnier sur parole, à un homme qu’on peut traiter comme un espion.

— Non, c’est impossible. Schuyler, notre noble commandant, est un homme juste et bien élevé. Il ne tolérera rien de semblable. Votre échange sera facilement effectué, et je puis m’engager à vous protéger.

Willoughby n’avait pas de répugnance à suivre cet avis, et il tâcha de faire comprendre à Maud que c’était le parti le plus sûr et le plus prudent qu’ils eussent à prendre. Mais notre héroïne avait une telle répugnance à s’occuper de projets de bonheur, si peu de temps après les pertes qu’elle avait faites, qu’il ne fut pas facile de la persuader. Elle n’y mettait aucune affectation, car elle avait trop de bon sens pour cela. Ses relations avec Robert Willoughby étaient très-affectueuses, elles n’avaient pas besoin d’être cachées, et se trouvaient encore plus sacrées à cause des scènes qui s’étaient passées. Elle ne se faisait aucun scrupule d’avouer son amour, mais elle n’osait pas se marier tandis que les taches de sang étaient encore autour des sièges où s’asseyaient ses parents. Elle les voyait encore à leurs places habituelles, elle entendait leurs rires, le son de leurs voix chéries, le murmure maternel, les jeux, les reproches du père et les douces appellations de Beulah.

— Pourtant, Robert, disait Maud, car elle l’appelait maintenant ainsi, trouvant le nom de Bob trop familier ; pourtant, Robert, ce serait une satisfaction, une triste satisfaction de nous unir à l’autel