Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 25, 1846.djvu/187

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entraînés par un mouvement plus rapide, passaient continuellement près de nous. Nous descendions lentement, parce que la masse qui nous portait était retardée soit par les bancs de sable semés sur la rive occidentale de la rivière, soit par le frottement contre les plaines de glace latérales. Cependant ce qui était incontestable, c’est que nous ne restions pas en place ; et je compris la nécessité d’atteindre le plus tôt possible l’extrémité occidentale de notre île flottante, afin de profiter de la première circonstance favorable qui pourrait se présenter.

Chère Anneke ! combien sa conduite fut admirable pendant tout le cours de cette nuit terrible ! Depuis le moment où elle avait repris complètement ses sens, lorsque je l’avais trouvée en prière au fond du traîneau, jusqu’à l’instant actuel, elle avait secondé mes efforts avec une patience et une résignation parfaites. Toujours prête à faire ce que je lui disais, pleine de confiance et de courage, elle ne s’était pas abandonnée un seul instant à ces terreurs exagérées si naturelles à son sexe, et qui n’auraient été que trop excusables dans une pareille situation. En gravissant cette échelle de glace, ce qui n’était nullement une entreprise facile, nous avions agi parfaitement de concert, et les efforts que j’étais obligé de faire m’étaient adoucis par l’empressement qu’elle mettait à me seconder et à suivre mes moindres conseils.

— Dieu ne nous a pas abandonnés, lui dis-je en voyant que ses forces semblaient être revenues, et nous pouvons encore espérer de nous sauver. Je me figure la joie dont le cœur de votre père sera inondé en revoyant sa fille saine et sauve, et en la serrant de nouveau dans ses bras.

— Cet excellent père ! quelles angoisses il doit éprouver en ce moment à mon sujet ! Allons, Corny, partons vite, et cherchons à le rejoindre, s’il est possible.

En disant ces mots, la chère enfant se leva, et ajusta ses vêtements de manière à ce qu’ils ne pussent gêner en rien ses mouvements, comme une personne qui se prépare à accomplir une tâche sérieuse, et qui veut y mettre toute son énergie. Elle avait abandonné depuis longtemps son manchon ; car la température était douce pour la saison, et nous n’aurions pas eu à souffrir du froid, quand même nos efforts auraient été moins énergiques.