Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 25, 1846.djvu/333

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Dès que Sans-Traces connut notre détermination, le Sauteur et lui se préparèrent au combat avec autant d’ardeur qu’aucun de nous. Nos dispositions étaient très simples et furent bientôt prises. Nous devions faire une seule décharge de la place où nous étions, pousser un grand cri, et charger, le couteau et le tomahawk à la main. Pas un instant ne devait être perdu. Au lieu de rester près de la lumière, quelque faible qu’elle fût, nous devions nous précipiter vers l’extrémité du ravin, et de la courir, ou tous ensemble ou séparés, suivant l’occasion, à la porte de Ravensnest. En un moment chacun fut à son poste.

— Rappelez-vous Traverse ! dit Guert énergiquement ; rappelez-vous le pauvre Sam tous nos pons amis massacrés

Le lecteur sait que Guert était sujet à retomber dans sa prononciation hollandaise, toutes les fois qu’il était vivement impressionné. Nous eûmes égard à sa recommandation : nous nous rappelâmes les morts ; et, sans en savoir précisément le nombre, je crois qu’il n’y eut aucun de nous qui, dans cette occasion mémorable, n’immola au moins une victime aux mânes de nos compagnons. Nos carabines partirent presque en même temps ; un cri s’éleva du milieu des sauvages qui entouraient le feu ; nos acclamations y répondirent, et nous nous élançâmes en avant, nous efforçant de dissimuler notre nombre à force d’audace et d’énergie.

Il est difficile de conserver une idée bien distincte d’une attaque pareille, faite dans l’obscurité. Ce que je sais, c’est que notre petite troupe se précipita au milieu des morts et des blessés, et que j’entendis Jaap asséner plusieurs coups terribles ; mais personne n’opposa de résistance. Un moment après que nous avions dépassé l’endroit où avait été allumé le feu, trois ou quatre coups furent tirés contre nous, mais sans atteindre personne. Il ne nous restait qu’une centaine de pas à faire pour sortir du ravin ; le peu de clarté qui venait du dehors servait alors à nous guider, et chacun se dirigea de son mieux de ce côté.

À partir de ce moment, je ne puis plus parler que pour moi. Je vis des hommes se glisser légèrement au milieu des arbres, et je supposai que c’étaient mes compagnons, sans pouvoir en avoir la certitude ; car nous étions tous séparés, et chacun de nous devait se tirer d’affaire comme il le pourrait. Comme nous n’avions