Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 25, 1846.djvu/364

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s’écria Guert avec émotion en me serrant vivement la main ; il faut bien du dévouement et du courage pour venir se hasarder dans cet antre de lions. Ne restez qu’un moment, je vous en conjure, de peur qu’il ne vous arrive quelque malheur ; cette poignée de main est inappréciable pour un homme dans ma position ; mais songez à Anneke. Ah ! Corny, mon cher ami, je serais heureux, même ici, si je pouvais penser que Mary Wallace éprouve quelque pitié pour moi !

— Soyez donc heureux, Guert ; je n’avais d’autre but en venant auprès de vous que de vous dire que vous aviez tout à espérer. Que dis-je, espérer ? Ce sont des assurances positives que je puis vous donner ; vous n’avez plus à craindre ni froideur, ni hésitation, ni remises, quand vous nous serez rendu.

— Littlepage, vous ne voudriez pas vous jouer de la sensibilité d’un pauvre captif qui est suspendu entre la torture et la mort ? Je puis à peine en croire mes sens, et cependant vous ne voudriez pas me tromper.

— Croyez ce que je vous dis ; figurez-vous l’attachement le plus tendre, le plus dévoué, et vous resterez encore au-dessous de la réalité. Si je vous quitte à présent, c’est pour aller seconder les efforts d’Herman Mordaunt pour que vous puissiez entendre de vos propres oreilles ce que je suis si heureux de pouvoir vous redire de sa part.

Guert ne répondit rien, il était trop affecté ; je lui serrai la main, et nous nous séparâmes, dans la ferme espérance, du moins de mon côté, que notre séparation serait courte. J’ai lieu de croire que l’émotion de Guert alla jusqu’aux larmes ; car, lorsqu’en m’en allant, je lui jetai un dernier regard, je vis qu’il s’était détourné, comme pour éviter les yeux de ceux qui étaient près de lui. Jaap était un peu en arrière, et il épiait mes mouvements avec la vigilance d’un chat. Je crus préférable de ne point lui parler, mais je lui adressai tacitement nu signe d’encouragement.

— Ces chefs sont loin d’être dans des dispositions très-amicales, Corny, me dit Herman Mordaunt des que je l’eus rejoint ; ils m’ont donné à entendre que Jaap ne serait délivré à aucune condition. Ils veulent avoir sa chevelure, me dit Susquesus, à cause de certain traitement qu’il a fait subir à l’un d’eux. Pour me