- Shakspeare.
L est facile de prévoir que l’Amérique est destinée à subir de
grands et rapides changements. Il en est qui sont plus particulièrement
du domaine de l’histoire ; ceux-là, c’est à l’histoire de
les raconter avec la véracité quelque peu suspecte qui distingue
trop souvent ses travaux ; mais il y a peu d’espoir qu’aucune
trace de la société américaine, envisagée sous son aspect privé,
soit conservée parmi nous par aucun des moyens ordinairement
en usage. Sans théâtre, du moins au point de vue national,
sans rien qui ressemble à des mémoires sur une vie contemporaine,
sans littérature légère, pour nous donner quelques esquisses
des mœurs et des opinions du jour, je ne vois vraiment
pas comment la génération qui suivra pourra conserver quelque
idée des usages et des traits caractéristiques de la nôtre. Quelques
traditions pourront bien se transmettre pendant quelque
temps ; mais si les vingt années à venir travaillent aussi activement
que celles qui les ont précédées, à substituer une race
entièrement nouvelle aux descendants de nos pères immédiats,
il y a gros à parier que ces traditions elles-mêmes seront emportées
dans ce tourbillon sans cesse renaissant d’étrangers. C’est
ce qui m’a déterminé à tenter un effort, pour conserver quelques
vestiges de la vie de famille, telle qu’elle existe à New-York,
tandis que je cherche à stimuler le zèle de quelques amis à New--