Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/109

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son opinion avait un grand poids, parce qu’il ne disait jamais : « Faites cela, » mais « faisons cela. » Joignant la pratique au conseil, il était toujours le premier à donner l’exemple. Un homme de cette trempe quand il suit son impulsion naturelle, modérée seulement par la prudence et la raison, exerce nécessairement une grande influence sur ceux avec lesquels il se trouve en contact.

— Venez, Mordaunt, venez, mon garçon, me dit-il dès que nous fûmes hors de la foule ; je vais vous servir de guide, et vous conduire dans la maison où vous avez droit de commander en maître.

— Laquelle ?

— La vôtre donc, et aucune autre. Elle est, comme nous autres vieux soldats, un peu décrépite. Mais nous avons tâché de la rajeunir un peu pour vous, mon garçon, et du moins vous trouverez tout en assez bon ordre. Les meubles de votre grand-père y sont encore, et Frank Malbone, Ursule et moi, nous y avons établi notre quartier général, depuis que nous sommes dans cette partie du pays. Vous savez que vous m’y avez autorisé ?

— Sans doute ; tout ce que j’ai n’est-il pas à vous ? Mais je croyais que vous vous étiez construit une hutte dans les bois de Mooseridge !

— C’est également vrai ; nous sommes tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Mes nègres sont à la hutte ; mais Frank, Ursule et moi, nous sommes venus pour vous recevoir.

— J’ai un chariot ici ; je vais entrer à l’auberge pour dire qu’on attelle.

— À quoi bon ! ne sommes-nous pas habitués, vous et moi, à aller à pied : un chariot, c’est bon pour le bagage. Le vrai soldat marche toujours.

— Eh bien ! donc, en avant, mon vieux camarade. Ce n’est pas moi qui resterai en arrière. Laissez-moi seulement prévenir mon domestique, pour qu’il nous suive avec les malles, quand il sera prêt.

Il y eut une scène de reconnaissance entre Jaap et le porte-chaîne, qui s’étaient trouvés souvent ensemble. Jaap avait suivi