Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/186

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— Quiconque entend quelque chose aux forêts ne niera pas que ce ne soient de grands avantages, et ces avantages, j’en jouis maintenant. Voilà soixante-trois ares de terres, nues comme la main, telles qu’on n’en trouverait pas de mieux défrichées dans tout le canton.

— Pensez-vous que le général Littlepage regarde comme une grande amélioration que tous les pins aient été coupés ? Vous savez aussi bien que moi que les pins ajoutent beaucoup à la valeur des terres de ce côté, à cause de la facilité qu’offre l’Hudson pour les transports.

— Mon Dieu ! jeune adolescent, pensez-vous que je n’y aie pas bien réfléchi, quand j’ai dressé ici ma tente ? Ce n’est pas vous qui apprendrez à une vieille cervelle comme moi où il convient mieux de donner le premier coup de hache. J’ai à présent sur la rivière, ou empilés sur le bord, ou dans la cour du moulin, cent vingt mille des plus belles planches qui aient été sciées, et il y a des bois tout prêts en assez grand nombre pour en faire au moins autant. Je suis tenté de croire, à votre langage, que vous n’êtes pas sans connaître ce Littlepage, et comme je n’y vais pas, moi, par quatre chemins, et que d’homme à homme j’aime ce qui est juste, Je vais vous dire mes intentions, afin que, si vous venez à le rencontrer, il puisse savoir que le vieux Mille-Acres est un homme raisonnable. Mais, par exemple, je n’en démordrai pas. Si le général veut me laisser porter tranquillement au marché tous nos bois, faire ma récolte, emporter les portes, les fenêtres, toutes les ferrures, ainsi que tout ce qui peut se détacher du moulin, je consens à me retirer au commencement du printemps, assez à temps pour que celui qu’il lui plaira d’envoyer puisse faire ses semences. Voilà ! ce sont mes conditions ; je n’en rabattrai rien. Mais j’irai jusque-là par amour de la paix. Car c’est étonnant, dit ma femme, à quel point j’aime la paix et la tranquillité !

J’allais répondre à cette communication caractéristique, lorsque Zéphane, l’aîné des fils du squatter, prit tout à coup son père par le bras et l’emmena à l’écart. Ce jeune homme, pendant notre conversation à l’entrée de la hutte, n’avait pas cessé de m’examiner. Je l’attribuai d’abord à un mouvement de curiosité assez naturel, lorsqu’il voyait pour la première fois quelqu’un qui