Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/222

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réussir à me rendre libre. Tobit fut le premier qui porta la main sur lui ; et comme il avait la clé de la prison, en un instant la porte fut ouverte, et le vieil André mis en cage avec nous. Ce mouvement fut exécuté avec d’autant plus de promptitude que le porte-chaîne se laissa faire.

Dès que ce nouveau prisonnier fut placé en lieu de sûreté, les fils de Mille-Acres relevèrent le corps de leur père qui était resté étendu sans connaissance, la tête ayant porté contre l’angle du bâtiment, et ils le portèrent dans sa maison, qui n’était pas éloignée. Toute la famille, grands et petits, vieux et jeunes, s’y réunit aussitôt, et il s’écoula une heure pendant laquelle tout autre intérêt sembla oublié. La sentinelle, qui était un fils de Tobit, déserta son poste ; et Laviny elle-même, qui avait rôdé toute la matinée en vue du magasin, paraissait ne plus songer à nous. J’étais trop occupé avec mon vieil ami, j’avais trop de questions à lui adresser, pour faire grande attention à cette désertion, qui, du reste, était assez naturelle dans ces circonstances.

— Je suis ravi que vous ne soyez pas dans les pattes de ces loups furieux, mon bon ami, m’écriai-je en serrant la main d’André avec effusion. Ils sont capables de tout ; et je tremblais que la vue de leur père, étendu devant eux sans connaissance, ne les portât à quelque acte soudain de violence. À présent ils auront le temps de la réflexion, et heureusement j’ai été témoin de tout ce qui s’est passé.

— Ne craignez rien du vieux Mille-Acres, dit le porte-chaîne avec son bon cœur ordinaire. Il est brusque, entêté, mais il revient vite ; et, dans une demi-heure, il sera doux comme un mouton ; Mais, Mordaunt, mon garçon, comment vous trouvez-vous ici ? Pourquoi rôder ainsi dans les bois la nuit avec Sans-Traces, qui m’a toujours paru plein de sens, et qui aurait dû cette fois vous donner un meilleur exemple ?

— J’avais la tête en feu, et, ne pouvant dormir, je voulus faire un tour dans la forêt ; je me suis perdu. Par bonheur Susquesus avait l’œil sur moi, et il ne m’a pas quitté. Je fus obligé de m’étendre sur un arbre tombé pour dormir quelques heures, car j’étais harassé, et le lendemain matin, quand je me réveillai,